vendredi 8 avril 2011

Enquêter sur les crimes de guerre israéliens à Gaza


par Stephen Lendman


Mondialisation.ca, Le 17 avril 2009




Des enquêtes indépendantes et des témoignages convaincants des deux bords fournissent des preuves incontestables de crimes de guerre israéliens à Gaza. Il est temps que les coupables rendent des comptes.

En février, le Centre Juridique Adalah pour les Droits des Minorités Arabes a montré indéniablement comment Israël a dérogé aux principes fondamentaux du droit international en attaquant aveuglément les civils, en dépit des affirmations des forces de défense israéliennes (IDF), selon lesquelles ces cas étaient justifiés.

Amnesty International a accusé Israël de crimes de guerre et a demandé au Conseil de Sécurité des Nations Unies d'imposer un embargo sur les armes.

Human Rights Watch (HRW) a une longue pratique d’action en agent impérial, même parfois en remplissant son mandat de « protection des droits de l’homme dans le monde entier... se tenant auprès d’eux et défendant la liberté politique en traînant les contrevenants en justice. »

Il a fait en partie cela dans un rapport intitulé Rain of Fire (Pluie de feu), citant « l’usage illégal de phosphore blanc par Israël à Gaza... dans des quartiers peuplés, tuant et blessant des civils, et endommageant des édifices civils, notamment une école, un marché, un entrepôt de l'aide humanitaire et un hôpital. »

L’IDF s’est aussi servi de « missiles, bombes, artillerie lourde, obus de char et armes légères, dans des quartiers à forte densité de population, en particulier dans le centre de la ville de Gaza, contrevenant au droit international humanitaire et aux règles de la guerre, qui exigent de prendre toutes les précautions possibles pour éviter de faire du tort aux civils et interdit les attaques aveugles. »

HRW qualifie le recours au phosphore blanc « d’aveugle, délibéré et inconsidéré. » Il dit que les États-Unis ont fourni les armes et le nécessaire permettant ces actions. Il demande instamment au Conseil de Sécurité des Nations Unies ou au Secrétaire Général de nommer une commission internationale indépendante pour enquêter sur les allégations crédibles de crimes de guerre, avec usage d’armes illégales.

Ne figurent pas dans le rapport les plus de soixante ans de massacres de masse et de destructions d’un traitement se résumant à un génocide. Ne sont pas non plus mentionnés l’impact exhaustif des 22 jours d'attaques, Gaza toujours en état de siège et la Cisjordanie sous occupation militaire. Non répertorié le bilan des morts et des blessés, des civils abattus de sang-froid, du grand nombre de maisons, bâtiments publics, hôpitaux, ambulances, bateaux de pêche, cultures, écoles, mosquées, entreprises, bâtiments et abris des Nations Unies, infrastructures et quartiers entiers, et de toutes les autres destructions aveugles. Silence aussi sur les effets incalculables du blocus contre 1,5 millions de Gazaouis et la poursuite des agressions contre eux.

Le 6 avril, Physicians for Human Rights-Israel (PHRI) et Palestinian Medical Relief Society ont compilé dans un long rapport les preuves détaillées des crimes de guerre : des témoignages de Gazaouis et du personnel médical sur le fait que des gens blessés ont été privés de soins, abattus à bout portant de sang froid, empêchés d’être évacués, et étaient terrorisés « sans merci. » Une équipe internationale indépendante de juristes, de personnel de santé et d’experts médicaux a effectué l'enquête.

Hadas Ziv, le directeur exécutif de PHRI, a déclaré : « L’une des difficultés du rapport est manifestement le préjudice envers les gens innocents... du déchaînement de pareille puissance de feu au sein de la population. » Il a enregistré les témoignages de 44 civils et a prélevé des échantillons de tissus, sol, eau, herbe des marais, soupçonnés d’être infectés par des munitions et des armes chimiques, puis les a envoyés au Royaume-Uni et en Afrique du Sud pour tests et évaluations.


Al-Haq durant l’Opération Plomb Fondu


Al-Haq est une ONG palestinienne de Ramallah en Cisjordanie, créée en 1979 pour « protéger et promouvoir les droits de l'homme et la primauté du droit » en Palestine occupée.

En avril, elle a publié un document sur la situation intitulé : « L’Opération Plomb Fondu et déformation du droit International : Analyse juridique de la prétention israélienne à l'autodéfense en vertu de l'article 51 de la Charte des Nations Unies. » Cette justification est absurde de la part d’une nation s’absolvant elle-même de crimes de guerre incontestables.

Néanmoins, le 30 mars (après 11 jours), l’IDF a clôturé son enquête sur les allégations de dérapages militaires, avec le Juge-avocat général, Avichai Mendelblit, les qualifiant dédaigneusement d’« heresay » basée sur aucune preuve corroborée. « Elles étaient basées sur des rumeurs et ne reflètent pas le déroulement des opérations sur le terrain. » C’est le genre de manœuvres dilatoires israéliennes typiques, chaque fois que ce pays est pris en flagrant délit, avec l’imputation de ses propres crimes à ses victimes.

Le 31 mars, un communiqué de presse du Centre Palestinien pour les Droits de l'Homme (PCHR) a déclaré :
Le PCHR « pense que la rapidité avec laquelle cette enquête a été conclue illustre l'incapacité constante de l’IDF à enquêter véritablement sur les crimes que ses soldats commettent régulièrement contre les civils palestiniens. Les enquêtes de cette nature ne sont pas conformes aux normes internationales d'indépendance et de transparence, et elles entravent la justice. »

Al-Haq a passé en revue les 22 jours « d’attaques aériennes sans relâche, accompagnées d’incursions terrestres intensives, » ainsi que les morts, les blessés et les destructions qu'elles ont provoquées. Pourtant, incroyablement, le matin avant l'attaque, Gabriela Shalev, l'ambassadrice d'Israël auprès des Nations Unies, a informé le Secrétaire Général :
Après une longue période d’extrême retenue, le gouvernement israélien a décidé à compter de ce matin d'user de son droit de légitime défense... comme le stipule l'article 51 de la Charte de l’ONU.

Cette justification est juridiquement indéfendable pour au moins deux raisons :
- Gaza reste en réalité occupé et Israël en porte l'entière responsabilité, et

- l'attaque israélienne était gratuite, préventive, en rapport avec l'occupation et le conflit plus large opposant la quatrième plus puissante armée du monde à une population civile sans défense, dotée seulement d’armes artisanales de petit calibre pour se défendre.


Le statut juridique de Gaza


Malgré le désengagement de 2005, Gaza demeure occupé. L'article 42 du Règlement de 1907 de La Haye stipule que :
Un territoire est considéré comme occupé quand il se trouve placé de fait sous l'autorité de l'armée ennemie. L'occupation ne s'étend qu'aux territoires où cette autorité est établie et peut être exercée.

Il existe légalement un « contrôle effectif » si des forces militaires antagonistes peuvent à chaque fois qu'elles le désirent assumer un contrôle physique sur une partie du pays. » Si, en plus, une « puissance occupante, » a assez de « force » ou de « moyens » pour infliger son autorité. Le plan de désengagement d'Israël affirme son droit à « garder et surveiller le périmètre terrestre extérieur de Gaza et à continuer à assumer son autorité sur son espace aérien » et sur son littoral. Il autorise aussi le déploiement de troupes à l'intérieur du territoire et le droit de contrôle administratif sur la population à travers le système fiscal, le registre de la population civile, et la régulation exclusive de l’entrée et de la sortie tout bien et personne.


L’autodéfense en vertu du droit international


L'article 2(4) de la Charte des Nations Unies déclare que tout État Membre « doit, dans ses relations internationales, s'abstenir de menacer ou d'employer la force contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique de tout État, et de tout autre recours incompatible avec l'objectif de l'Organisation des Nations Unies. »

Toutefois, la Charte autorise la force armée à deux conditions : quand elle est permise par le Conseil de Sécurité ou par l'article 51, qui autorise le « droit individuel ou collectif à l'autodéfense quand une agression armée se produit contre un Membre... jusqu'à ce que le Conseil de Sécurité prenne des mesures pour maintenir la paix et la sécurité. »

L’Opération Plomb Fondu était une agression gratuite dans le contexte de 42 ans de conflit et d’occupation, un cadre « régi exclusivement par le droit humanitaire international, » pas par les lubies de l'occupant pour exercer une pression.

L'article 51 ne s'applique pas à une puissance occupante, puisque Israël est assujetti au droit international humanitaire, notamment aux dispositions de la Quatrième Convention de Genève. Israël a certaines obligations juridiques spécifiques envers Gaza et la Cisjordanie :
- traiter les civils avec humanité,

- s'abstenir d'actes de violence de toute nature,

- soigner les malades et les blessés,

- assurer une alimentation suffisante et des fournitures médicales,

- fournir des garanties juridiques, et

- s'occuper à tout égard des « personnes protégées » sous son contrôle.

Le droit international limite aussi les méthodes de combat et les moyens utilisés par toutes les parties. Légalement, seule la définition stricte de la « nécessité militaire » justifie une attaque, contre des objectifs dans l’intention d’affaiblir ou de vaincre l'ennemi ou de mettre fin au conflit. Même dans ce cas les principes de distinction et de proportionnalité s'appliquent :
- faire la distinction entre cibles militaires et civiles et non militaires ; attaquer ces dernières étant un crime de guerre, et

- la règle de proportionnalité s’oppose à la force disproportionnée aveugle, susceptible de provoquer des dommages ou des pertes de vies humaines ou d'objets.

Israël est aussi tenu avant toute attaque de prévoir des « alertes efficaces à l’avance, » pour avertir les populations civiles, puis de prendre toute mesure possible pour minimiser les pertes chez les non-combattants. En vertu de la Quatrième Convention de Genève, les « zones neutres » doivent être protégées afin d'assurer qu'elles soient le plus possible exemptes de dommages au cours du conflit.

Israël a dérogé aux règles de la guerre et de l'occupation et a commis des crimes de guerre et contre l'humanité. Il a attaqué les civils d’une façon disproportionnée, sans distinction, en particulier dans les quartiers densément peuplés. Il n’a fait aucun effort pour faire la distinction entre les cibles militaires et civiles. Il délibérément pris pour cible la totalité de la population de Gaza, de ses biens et infrastructures, sans discrimination, contrevenant gravement aux Conventions de Genève et aux autres règles du droit humanitaire international. Ainsi qu’aux lois de la guerre. En tant que tel, ses gouvernants et commandants sont pénalement répréhensibles et doivent être tenus pour responsables de leurs actions.

Al-Haq a conclu :
« S’en remettre à l'autodéfense, de la part d’Israël, mal interprète le droit international dans une démarche visant à se soustraire à ses obligations juridiques internationales ... » Son argument d’autodéfense est illégitime en vertu de l'article 51 et « n'a aucune validité au regard du droit international. »


L’enquête de l’ONU sur les crimes de guerre à Gaza


Le 3 avril, l'ONU a annoncé la nomination de Richard Goldstone à la tête d'une enquête d’information à Gaza, sur les allégations de crimes de guerre commis là-bas au cours de l’Opération Plomb Fondu. Martin Uhomoibhi, le président du Conseil des Nations Unies aux Droits de l'Homme, a déclaré qu’une équipe indépendante d'experts effectuera la mission dans les prochaines semaines après en avoir discuté à Genève.

Goldstone est un juriste respecté, qui a été juge pendant neuf ans à la Cour Constitutionnelle de l'Afrique du Sud. Il a aussi siégé en tant que procureur en chef de l'ex-Yougoslavie et des tribunaux du Rwanda, et est membre du conseil de l'Université Hébraïque. En tant que Juif sa nomination l’a « choqué, » mais il a promis d'être juste et équitable. Il « espère que les conclusions... vont apporter une contribution significative au processus de paix... et rendre justice aux victimes. »

C’était l'une des 16 personnalités internationales, avec l'archevêque Desmund Tutu, qui ont exigé le 17 mars une enquête pour crimes de guerre. Son mandat est de se focaliser sur les victimes palestiniennes de la dernière guerre à Gaza, mais il enquêtera sur toute violation présumée, avant, pendant et après le conflit.

Israël a toujours refusé avant de participer aux enquêtes précédantes du Conseil, en les qualifiant de partiales. On ne sait pas si Israël coopérera maintenant, après que Yigal Palmor, le porte-parole du Ministère des Affaires étrangères, a déclaré : « Ce comité est chargé non pas de rechercher la vérité, mais d’accuser Israël des crimes présumés. » Il a accusé le Conseil de n'avoir « pratiquement pas du tout de crédibilité. »

Goldstone est actuellement Compagnon de Spinoza au Netherlands Institute for Advanced Study de La Haye. Il a reçu plusieurs récompenses des droits de l'homme, la toute dernière, le Prix de la Fondation MacArthur pour la Justice Internationale lui sera attribuée à La Haye le 25 mai 2009.

Le 3 mai 2007, il était sans équivoque en tant que l'un des quatre membres du comité, sur la question de savoir si les procès en crimes de guerre font plus de mal que de bien. Au moment où on lui a demandé de participer, il a dit que « les organisateurs devaient savoir que je dirais qu'ils font plus de bien que de mal et que c’est, bien sûr, mon point de vue. »

Il a cité la réalisation de Nuremberg comme « la première démarche ayant fait rendre des comptes à des criminels qui ont violé le droit pénal international. C’était la première constatation du fait que la primauté de la loi pourrait être appliquée au niveau international, » mais à travers un « procès équitable » exposant « les plus effroyables crimes de guerre, » en attirant l’attention sur « les victimes... Elles savent ce qui leur est arrivé. Elles n'ont pas besoin d'aller au tribunal et d’écouter les charges... mais elles ont besoin de la reconnaissance officielle pour commencer leur processus de guérison... Je ne doute pas que le monde soit un meilleur endroit aujourd'hui à la suite de l’essor rapide de la justice pénale internationale » et de l’instauration de la Cour Pénale Internationale par le Traité de Rome.


Directives d’enquête de B'Tselem sur l'Opération Plomb Fondu


B'Tselem est le Centre d'Information Israélien sur les Droits de l'Homme dans les Territoires Occupés. Il fait partie d'une coalition d'organisations des droits humanitaires israéliennes, qui poussent Israël à enquêter de manière approfondie et équitable sur les allégations de ses crimes de guerre. Bien sûr, nous savons maintenant qu'il les blanchira, comme il l’a fait dans le passé.

B'Tselem cite néanmoins l'atrocité des morts, blessés, destructions, sans-abri, pertes humaines irrévocables et souffrances, qui exigent amplement de rendre des comptes. Il a préparé un document « définissant les principales questions » concernant la conduite d'Israël et a présenté les lignes directrices pour l’examiner.


Tirs sur les civils


Des civils ont été délibérément pris pour cible, en violation du droit international, et la grande majorité des morts et des blessés étaient des non-combattants. B'Tselem a répertorié de nombreux cas, « dans lesquels de jeunes hommes ne participant pas aux hostilités ont été tués » ou blessés.

« L’examen de la conduite de l’IDF au cours de l'opération pose de graves soucis quant à l'étendue de ses manquements envers ses obligations en vertu du droit humanitaire international. » Des preuves incontestables, qu’aucune norme ou arrangement de la loi ne peut démentir, montrent des crimes de guerre systématiques et cruels.

Pendant le conflit, B'Tselem a obtenu « des récits particulièrement graves de soldats tirant intentionnellement sur des civils » non-combattants. Ils doivent faire l’objet d'une enquête approfondie pour déterminer si les commandants ont ordonné ces actions ou si les militaires ont agi de leur propre chef.


L’absence de protection des civils


Israël a volontairement emprisonné 1,5 millions de Gazaouis durant le conflit. Les passages frontaliers ont été fermés, et l'Égypte (en accord avec Israël et Washington) a refusé d'ouvrir celui de Rafah. Israël a prétendu que le largage de circulaires était suffisant. Faux. Le droit international exige qu’un préavis soit donné à l’avance et que toute précaution soit prise pour protéger les civils. À la place, ils ont été pris pour cible dans leurs maisons, écoles, mosquées, lieux de travail, et abris de l'UNRWA.

B'Tselem a obtenu des témoignages selon lesquels l’IDF s’est aussi servi de Palestiniens comme boucliers humains. On leur a ordonné d’entrer dans des bâtiments devant les soldats pour s’assurer qu'ils n’étaient pas piégés. Et aussi d'éliminer les objets suspects sur les routes et de se tenir devant les militaires qui auraient pu être tués. L'article 28 de la Quatrième Convention de Genève interdit ces pratiques, et précise que :
« La présence d'une personne ne peut servir à mettre des lieux ou des zones à l’abri des opérations militaires. » En d'autres termes, à servir de boucliers humains. Dans l’affaire Adalah et autres contre OC Central Command et autres, la Cour suprême israélienne a interdit toute forme de cette pratique dans un but quelconque.


Prendre pour cible des symboles gouvernementaux


Pendant le conflit, l’IDF a bombardé des centaines de cibles civiles, des maisons, hôpitaux, écoles, mosquées et bâtiments publics, en violation flagrante envers le droit international. Réponse d’Israël : les cibles « supportant le financement, la planification et la réalisation d'actes terroristes » ont été frappées. D'autres déclarations étaient similaires, mais omettaient de dire en quoi ces bâtiments avaient un caractère militaire. B'Tselem a conclu que « la raison de frapper ces objectifs n’était pas en rapport avec leur usage et il était donc interdit de les attaquer. »

Pour sa part, Israël a prétendu que tout ce qui concernait le Hamas faisait une cible légitime. Dan Harel, le vice-chef d'état-major général, a déclaré :
« Nous frappons non seulement les terroristes et les lanceurs, mais aussi l'administration du Hamas entière, et toutes ses armes. Nous frappons les édifices publics, usines, agences de sécurité, etc. Nous invoquons la responsabilité gouvernementale du Hamas et nous ne faisons pas de distinction entre les différentes branches. Après l'opération, aucun bâtiment du Hamas ne sera laissé debout. » Il avait inclus vraisemblablement les hôpitaux, écoles, mosquées et les maisons particulières.

Une autre déclaration officielle, disait :
« Quand une organisation terroriste contrôle un gouvernement, tous les ministères du gouvernement servent à assumer les objectifs de l'organisation terroriste. Pourquoi, supposez-vous que le ministère du Transport palestinien ne sert qu'à établir des lignes de bus ? Peut-être sert-il à d'autres fins. Le Hamas ne fait pas les séparations qui sont coutumières dans les pays bien dirigés. » Peut-être aussi que les chirurgiens, les enseignants, les femmes et les enfants sont des kamikazes secrets, et donc des cibles légitimes.

B'Tselem a écrit au Ministre de la Justice d'Israël, Menachem Mazuz, « pour demander des clarifications sur les attaques contre les civils. » La réponse « a complètement ignoré les questions posées... »


L’évacuation des blessés et les attaques contre les équipes médicales

Il y a eu de nombreux rapports sur le fait que l’IDF a pris pour cible les hôpitaux, les ambulances, et les employés aux soins médicaux, et « que les soldats empêchaient d’amener les blessés à l'hôpital. » Dans certains cas, ils ont tiré à bout portant sur les blessés ou les ont laissé mourir sur place en se vidant de leur sang. Dès qu’Israël a envahi, la circulation des équipes médicales a été impossible « car c’était sur l'accès aux hôpitaux du secteur central de Gaza... au moins 16 équipes médicales ont été prises pour cible et tuées au cours de l'opération. »

Le CICR s’est écarté de sa procédure habituelle en déclarant qu'Israël a violé le droit international humanitaire qui exige de s’occuper et d'évacuer les blessés, et qu’empêcher ou retarder cela est illégal et inacceptable.

Le 6 janvier, huit organisations de défense des droits de l'homme ont adressé une pétition à la Cour Suprême « exigeant que l'armée permette aux équipes médicales et aux ambulances de se déplacer dans Gaza et autorise l'évacuation des blessés vers les hôpitaux. » Israël a prétendu avoir donné l’instruction explicite de s'abstenir d'attaquer les équipes médicales et les ambulances et de laisser évacuer les blessés vers les hôpitaux, puis a apporté des précisions dans une déclaration disant :
Les rapports reçus indiquent clairement et sans équivoque que les activités terroristes utilisent parfois des ambulances pour commettre des actes terroristes, et se déguisent aussi en personnel médical. Il s'agit d'un mode opérationnel plutôt que d'incidents isolés et exceptionnels.

C’est typique de la défense israélienne pour justifier ses crimes de guerre et contre l'humanité les plus révoltants. Il s’agit d’un bouclier juridique fictif, rejeté par la jurisprudence internationale. C’est fondé sur des suppositions, et non pas sur des faits, et ce serait rejeté de toute juridiction légitime du fait que c’est non établi et non démontré.

Le droit international est clair et sans équivoque. Les hôpitaux civils, le personnel médical, et toute personne s’occupant des blessés, ne peuvent en aucun cas faire l'objet d'attaques, mais doivent être ménagés et protégés tout le temps par les parties en conflit. » Israël accuse le Hamas au lieu d’assumer la pleine responsabilité de ses actes.


La destruction de l'infrastructure civile et des services publics


Pendant le conflit, les infrastructures civiles de Gaza et les services publics « ont été presque totalement détruits. » Les centrales électriques ont épuisé leur carburant et se sont arrêtées. Les habitants avaient à peine 25% de l'électricité nécessaire. Les services des eaux et des égouts ont été détériorés. À l’apogée des combats, plus de 800.000 personnes n'avaient plus d'eau courante. Les eaux des égouts se sont répandues sur les terres arables et ont inondé les rues de Beit Hanoun. Les hôpitaux ont dû recourir à des générateurs. Ces personnes ont aussi souffert de la pénurie de pratiquement tout ce qui est nécessaire pour vivre. La nourriture et les autres choses essentielles étaient difficile à obtenir. Les boulangeries étaient fermées pour manque de farine, de gaz et d'électricité pour la cuisson. Les organismes internationaux étaient dans l’incapacité de distribuer la nourriture et les autres fournitures.

Le résultat a été un désastre humanitaire aggravé par 18 mois d’état de siège. Deux semaines avant le début de l’offensive, un rapport de l'OCHA disait que Gaza était en crise, et que ses habitants luttaient au quotidien pour répondre à leurs besoins élémentaires et survivre, comme obtenir suffisamment de nourriture, d'eau, de carburant et de soins médicaux. La plupart d'entre eux se sentaient piégés sur le plan « physique, mental et émotionnel. »

Selon OCHA, au deuxième trimestre 2008 le taux de chômage atteignait 50%, et, en 2007, 79% des ménages vivaient dans la pauvreté et pour 70%, elle était « profonde. » C’était Gaza à la veille du conflit. Aujourd'hui, après tant de destruction, c'est bien pire.


Conclusion


« L'étendue des atteintes à la population civile au cours de l'Opération Plomb Fondu est sans précédent. C'est seulement maintenant que se révèle l'ampleur des destructions » avec davantage de preuves révélées par de récents témoignages. Des familles entières ont été tuées. Des parents ont été impuissants à empêcher leurs enfants de mourir. D'autres n’ont pu empêcher un être cher de mourir en se vidant de son sang. Ce sont des cicatrices indélébiles, à jamais gravées dans la mémoire collective d'un peuple torturé, isolés, négligé, et méprisé par les dirigeants du monde entier.

Des groupes des droits humanitaires et autres exigent que les comptes soient intégralement rendus « pour les crimes les plus graves. » Israël prétend que son armée a agi comme il faut. Ehud Barak, le Ministre de la Défense, a qualifié l’IDF « d'armée la plus morale du monde... qui a usé de tous les moyens possibles pour éviter de blesser les gens. » Le juge-avocat général de l'armée israélienne, Avichai Mandelblit, a dit à B'Tselem :
Bien que nous regrettions, bien sûr, tout tort envers les civils, nous soulignons de nouveau que la responsabilité de tout ceci se trouve uniquement sur le seuil de la porte de l'organisation du Hamas...

B'Tselem a été implacable en qualifiant d’« inacceptables » les actes d'Israël. Le droit international protège les civils des « effets horribles de la guerre... User d’une terminologie ambiguë et d’arguments injustifiés pour excuser d’aussi graves torts envers les civils, dans une démarche destinée à créer un semblant de respect de la loi, constitue » une tromperie flagrante de tout premier ordre.

La conduite d'Israël « fait sérieusement soupçonner que les soldats et les commandants ont violé le droit international humanitaire, » volontairement et de façon réitérée. « Compte tenu de tout cela, une expertise publique... est essentielle... L’ampleur et la gravité des violations ne peuvent être déterminées que dans le cadre d'une enquête approfondie, indépendante, efficace, ouverte à la critique publique, et effectuée dans un délai raisonnable. »

B'Tselem demande instamment à Israël de le faire. Jamais il n’a été et ne va maintenant au-delà d’affirmer qu’il faut examiner les allégations, et déterminer si elles sont sans fondement. Seul un organisme indépendant devrait être investi. Il reste à voir si, avec Richard Goldstone, l’équipe du Conseil des Nations Unies sur les Droits Humanitaires sera à la hauteur. Le monde entier regarde.


Stephen Lendman est un chercheur associé au Centre de Recherche sur la Mondialisation (Global Research). Il vit à Chicago et peut être contacté à lendmanstephen@sbcglobal.net. Le site de son blog est sjlendman.blogspot.com.



Texte original en anglais : Investigating Israeli War Crimes in Gaza, publié le 15 avril 2009.

Traduction : Pétrus Lombard. 




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