jeudi 19 mai 2011

Le chef du FMI attrapé dans un piège à miel


par Mike Whitney

Je n’ai aucun moyen de savoir si la femme de ménage de 32 ans qui prétend avoir été attaquée et forcée de pratiquer une fellation sur la patron du FMI Dominique Strauss-Kahn, dit la vérité ou non. Je vais laisser cela à la meute hurlante des médias qui a déjà assumée son rôle de juge, jurés et exécuteur des hautes œuvres. Je dirai simplement que toute cette affaire est glauque, tout comme l’affaire Spitzer. Spitzer, si vous vous rappelez, était le plus gros adversaire de Wall Street et un candidat favori pour diriger la SEC (NdT: la commission de la sécurité des échanges de Wall Street, le régulateur des échanges, le shériff de Wall Street), une position qui lui aurait été comme un gant.
En fait, il ne fait aucun doute por moi que si Spitzer avait été nommé à la tête du SEC, la plupart des plus gros banquiers d’investissement à Wall Street seraient en train de confectionner des plaques d’immatriculation et des chaussures à semelles de corde dans des pénitentiers fédéraux au jour d’aujourd’hui. Il y avait donc beaucoup de raisons de filer Spitzer, de savoir tout ce qu’il faisait et de voir quel type de fange il était possible d’utiliser contre lui. L’ancien gouverneur de New York rendit le travail facile à ses ennemis en engageant les services d’une prostituée de luxe du nom de Ashley Dupré pour une partie de jambes en l’air à l’hôtel Mayflower. Quand la nouvelle fut répandue, les médias descendirent sur Spitzer comme un nuage de locustes se répandant sur chaque détail salace de l’affaire avec ferveur. Pendant ce temps là, les escrocs de Wall Street purent soupirer de soulagement et retourner à ce qu’ils font le mieux: tondre les investisseurs et voler les particuliers de leurs économies amassées durant une vie.
Strauss-Kahn a aussi des ennemis haut-placés, c’est pourquoi toute cette affaire pue jusqu’aux cieux. Premièrement, Strauss-Kahn était le candidat probable du parti socialiste français qui aurait vraisemblablement fait face à Sarkozy dans les élections présidentielles à venir. Le patron du FMI avait dans aucun doute un avantage sur Sarkozy qui a été diminué par un nombre de scandales personnels et une chute dans les sondages.
Mais si Strauss-Kahn a été piégé, cela fut sans doute fait par des membres de la coalition des banques occidentales, ce groupe porcin de l’ombre qui s’auto-gère et dont les politiques ont maintenu la plus grande partie de l’humanité dans des états variés de pauvreté et de désespoir ces quelques derniers siècles. Strauss-Kahn s’était quelque peu émancipé de la “ligne du parti” ces derniers temps et était en train de changer la direction du FMI. Sa conversion sur la route de Damas a été endorsée par l’économiste progressiste Joseph Stiglitz dans un récent article intitulé: “Le changement d’horaire du FMI” (NdT: “The IMF’s switch in Time” en anglais), dont voici un extrait:
“La réunion annuelle de printemps du FMI fut remarquable au point de noter l’effort du Fond de se distancier de ses tenets établis depuis longtemps du contrôle des capitaux et de flexibilité dans le marché du travail. Il apparait qu’un nouveau FMI ait émergé, graduellement, précautionneusement, sous la houlette de Dominique Strauss-Kahn.
Un peu plus de 13 ans plus tôt, à la réunion du FMI à Hong Kong en 1997, le Fond avait tenté d’amender sa charte afin d’acquérir une plus grande marge de manœuvre pour pousser les pays à la libéralisation du marché des capitaux. Le timing ne pouvait pas être pire: la crise en Asie du Sud-Est était en train de bouillir sur le coin du feu, une crise qui était essentiellement le résultat de la libéralisation du marché du capital dans cette région qui, en accord avec son haut ratio d’épargne, n’en avait nul besoin.
Cette poussée avait été préconisée par les marchés financiers occidentaux, et leurs ministères des finances qui les servent si loyalement. La dérégulation financière aux Etats-Unis fut la cause principale de la crise financière globale qui a éruptée en 2008; la libéralisation financière et du marché des capitaux partout ailleurs a aidé à propager ce traumatisme “made in USA” à travers le monde. La crise a démontré que des marchés libres et non régulés ne sont ni efficaces, ni stables.” (“Le changement d’horaire du FMI”, Joseph Stiglitz, Project Syndicate)
Ainsi, Strauss-Kahn était en train d’essayer de faire bouger les banques dans une direction plus positive, une direction qui n’aurait pas demandé que les apys laissent leur économie ouverte à tous les vents des ravages du capital étranger qui s’engouffre rapidement, gonflant les prix et créant des bulles financières, et qui s’en va très rapidement, aussi rapidement qu’il est venu, laissant derrière lui, la désolation du chômage galopant, d’une chute drastique de la demande dommestique, des industries handicapées et une profonde récession économique.
Strauss-Kahn s’était positionné sur un chemin plus “doux, plus gentil”, un chemin qui ne forcerait pas les leaders étrangers à privatiser les industries d’état ou à écraser leurs syndicats du travail. Bien sûr, ses actions ne furent pas chaleureusement reçues par les banquiers et les industriels qui regardent le FMI comme le légitimeur de leur pillage du reste du monde. Ce sont les gens qui pensent que les politiques actuelles “sont très bien comme cela” parce qu’elles produisent les résultats qu’ils attendent, à savoir: de plus gros bénéfices pour eux-mêmes et plus de pauvreté pour les autres.
Voici encore un extrait de Stiglitz, cette fois-ci donnant le “baiser de la mort” à son ami Strauss-Kahn:
“Strauss-Kahn est en train de prouver qu’il est un patron perspicace du FMI… Comme Strauss-Kahn conclut dans son discours à la Brookings Institution peu avant la réunion récente du FMI: ‘Ultimement, l’emploi et les équités construisent des blocs de stabilité et de prospérité économiques, une stabilité politique et la paix. Ceci tient à cœur au mandat du FMI et doit être placé au cœur même de l’agenda politique.”
Très bien. Alors, maintenant, le FMI va devenir un agent de la redistribution de la richesse… pour “renforcer le marchandage collectif, restructurer les emprunts, restructurer les impôts et les politiques de dépense pour stimuler l’économie aujourd’hui par des investissements à long terme et pour appliquer des mesures sociales qui assureront une opportunité réelle pour tous” ? (d’après Stiglitz)
Bonne chance avec cela.
Pouvez-vous imaginer une seconde à quel point ce genre de discours énerve les pontes du fric à tout va ? Combien de temps croyez-vous qu’ils vont rester à ne rien faire devant ce piège à rat avant qu’ils ne décident que Strauss-Kahn a besoin de vacances définitives ?
Pas bien longtemps, j’en suis sûr.
Analysez ceci venant de World Campaign et jugez par vous-même si Strauss-Kahn est devenu un “boulet” qui doit être éliminé afin que les affaires d’extraire la richesse des gens les plus pauvres de la Terre puisse continuer en paix:
“Pendant des décennies, le FMI a été associé par les activistes anti-pauvreté anti-faim et pour le développement du tiers monde comme la vitrine de tout ce qu’il y a de mal dans la gestion fiscale du monde par sa frange la plus riche, particulièrement concernant les nations les plus pauvres avec ce qui apparait être une vision uni-dimensionnelle de politiques fiscales de serrage de ceinture comme étant le prix d’obtention des ses prêts et une philosophie économique du compte-goutte qui a traditionnellement aidée les élites riches et puissantes à maintenir le statu quo alors qu’une vaste majorité grandissante demeurait pauvre et sans pouvoir. Avec un monde de plus en plus en révolution à cause de ces réalités, après la crise financière globale, la régulation et autres politiques qui ont fonctionnées lors de la dernière grande dépression ayant été largement aandonnée, le directeur de gestion du FMI Dominique Strauss-Kahn a fait d’excellentes observations sur la façon dont le FMI et le monde se doivent de changer leur politique.
Dans un article aujourd’hui du Washington Post, Howard Schneider écrit qu’après le crash de 2008 qui a amené de nouveau vers certaines régulations de compagnies financières et de l’implication du gouvernement dans l’économie, pour Strauss-Kahn “le travail est à moitié fait”, alors qu’il a amené le FMI à repenser fondamentalement sa théorie économique. Dans de récentes remarques, il a donné une large vision des conclusions atteintes: La régulation des marchés par les états doit être plus importante, les politiques globales se doivent de créer une distribution plus équitable des richesses; les banques centrales ont besoin de faire plus pour prévenir que les prix des emprunts et des biens ne gonflent trop rapidement. ‘le mouvement va basculer des marchés vers les états’ a dit Strauss-Kahn dans une adresse à l’université de Washington la semaine dernière. ‘La globalisation a apporté beaucoup, mais elle a aussi un côté obscur, un grand fossé qui se creuse toujours plus entre les riches et les pauvres. Clairement, nous avons besoin d’une nouvelle forme de globalisation pour prévenir que cette “main invisible des marchés” à laquelle on a laissé beaucoup de liberté, ne devienne ‘un poing invisible’.”
Répétons: “… repenser fondamentalement la théorie économique… (une meilleure) distribution des revenus… (plus) de régulation des compagnies financières… Les banques centrales doivent faire plus pour prévenir l’augmentation trop rapide des prix des emprunts et des biens…”
Vous vous moquez de moi ? Relisez ce passage encore et encore et je pense que vous tomberez d’accord avec moi que Strauss-Kahn a signé son propre arrêt de mort.
Il n’y aura aucune révolution au FMI. C’est du pipeau. L’institution a été créée avec l’intention claire d’escroquer les gens et elle a fait un super boulot en ce domaine jusqu’ici. Il n’y aura pas de changement de politique non plus. Pour quelle raison ? Pour avoir les banquiers et les rats obèses de l’industrie soudainement développer une conscience et qu’il décident de prêter main forte à l’humanité souffrant depuis si longtemps ? Allons, allons, soyons réalistes !
Strauss-Kahn a rompu les rangs et s’est aventuré en terrain inconnu. Voilà pourquoi il a été piégé et écrabouillé comme un insecte.
(Note de l’auteur: Strauss-Kahn a été remplacé à la tête du FMI par son numéro 2, John Lipsky, l’ancien vice chairman de la banque d’investissement JP Morgan. Comment le trouvez-vous ce “changement auquel on peut croire” ?…)


Article original en anglais : http://www.globalresearch.ca/index.php?context=va&aid=24784

Traduction : Résistance 71

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