la reconnaissance de l’État palestinien
lundi 19 septembre 2011 - 08h:35
Jean-Paul NUÑEZ - CCIPPP34
La justice et la paix ne viendront que le jour, pour le coup vraiment historique, où nous (Palestiniens et nous réunis) aurons réussi à éliminer définitivement ces idéologies racistes, ces mentalités coloniales et ces logiques d’apartheid.
L’accommodation à l’ordre du monde a oblitéré la liberté des esprits. Tout le bruit développé autour de la reconnaissance de l’État palestinien en est un nouvel exemple frappant. Il semble que nous soyons retourné 20 ans en arrière, lorsque nous assistions à l’excitation concernant l’annonce des accords d’Oslo et des « négociations pour la paix ». Et c’est avec une certaine humilité que chacun devrait entendre et mesurer les raisons pour lesquelles le projet présenté par l’Autorité palestinienne (AP) de faire reconnaître par l’ONU un « État » Palestinien ne fait pas du tout l’unanimité chez les Palestiniens.
De surcroît, chacun devrait réaliser que cette reconnaissance n’aura aucun impact sur le terrain ; le mur de séparation érigé en territoire palestinien, le blocus de Gaza, les ravages causés à leurs terres par les colonies israéliennes, l’humiliation aux points de contrôle, les restrictions en matière de liberté religieuse et le contrôle des accès aux lieux saints, le sort des réfugiés attendant leur droit au retour et des prisonniers croupissant dans les prisons israéliennes, le mépris manifeste d’Israël pour le droit international...
C’est peut-être cette attitude qui nous permettrait de comprendre par quel subterfuge la communauté internationale, à la quelle nous appartenons, a réussi à faire disparaître en quelques décennies l’État de Palestine tel que reconnu par la Société des Nations qui s’étendait du Jourdain à la Méditerranée. D’autant que c’est bien cet État que l’on voudrait aujourd’hui « légitimer » à nouveau sur 10% de son territoire c’est à dire sous la forme d’un ridicule « bantoustan ».
De même que nous devrions essayer de déchiffrer ce que signifie le fait de voir un certain nombres d’États de la planète, les même qui n’ont jamais fait respecter le droit international pour les Palestiniens, entériner à partir d’un indéfinissable « bantoustan » d’abord la Nakba qui est l’opération d’épuration ethnique la plus aboutie, le colonialisme le plus sordide qui est porté par l’idéologie sioniste et la logique d’apartheid que vivent les Palestiniens.
Alors que la seule certitude que nous pouvons avoir c’est que la justice et la paix ne viendront que le jour, pour le coup vraiment historique, où nous (Palestiniens et nous réunis) aurons réussi à éliminer définitivement ces idéologies racistes, ces mentalités coloniales et ces logiques d’apartheid.
Ceci étant, dans le même temps, toute cette agitation autour de la reconnaissance risque d’être « dépassée ». Il est vrai qu’au moment où les peuples arabes expriment une volonté de se débarrasser de régimes qui demeurent, ou demeuraient, fondamentalement, inféodés aux puissances occidentales et impériales, la revendication de l’État palestinien indépendant paraît anachronique. Elle implique son acceptation et sa reconnaissance par la puissance coloniale, Israël et ses amis occidentaux. Ainsi, il est évident que ce projet d’État apparaît en décalage avec les nouvelles générations politiques émergentes et les revendications d’indépendance et de souverainetés économique et politique réelles qui bouleversent le monde arabe en profondeur.
Dans ce contexte, deux moments forts sont significatifs :
D’une part, il y a eu l’incroyable attaque de l’ambassade israélienne au Caire et la fuite précipitée et bien peu glorieuse de l’ambassadeur et de la plupart des membres de l’ambassade.
D’autre part, il y a les suites de l’affaire de la “flottille de la liberté”. La Turquie veut des excuses et des dédommagements d’Israël. Cette demande, qui pourrait être anodine et s’estomper, dans d’autres circonstances, s’est au contraire exacerbée et devient un facteur émotionnel de communication d’un énorme poids politique dans tout le Proche-Orient.
On mesure la puissance de ces événements au travers de la puissance de la Turquie et de l’Égypte, de l’activisme soudain de leurs politiques vis-à-vis d’Israël qui s’expriment comme s’il y avait préméditation et coordination.
Face à cela, les USA, sans même insister sur l’évidence d’une position désastreuse d’effondrement de leur puissance, sont pris entre divers marteaux et enclumes, avec trois alliés aussi précieux les uns que les autres engagés dans un jeu triangulaire que personne n’auraient pu imaginer.
Personne ne peut dire où va nous mener cette affaire triangulaire Turquie-Israël-Égypte. La seule chose dont on peut être certains, c’est que l’Histoire poursuit son galop, à son idée, sans vraiment se préoccuper des reconnaissances ou autres moment soi-disant « importants », par une dynamique absolument déstabilisatrice qui attaque les structures déjà éparpillées du système régional que les puissances occidentales ont élaboré il y a un demi-siècle. Tout cela va profondément bouger avec des Palestiniens au cœur de cette dynamique. Tant il est sûr que l’effet du “printemps arabe” n’est pas de conforter les illusions démocratiques de la modernité mais de mettre à nu les situations insupportables mises en place par les puissances occidentales.
Alors, peu importe les agitations conjoncturelles... peu importe ce qui se passera à l’ONU parce que, comme le disent des palestiniens, que ce soit le BNC, le mouvement « Stop the wall » et beaucoup d’autres, et que résume bien le Mouvement de la jeunesse Palestinienne :
« Que la proposition pour la reconnaissance de l’État soit acceptée ou non, nous appelons les Palestiniens sous occupation, dans les camps de réfugiés et en exil à rester engagés, convaincus de la valeur de notre lutte, et guidés par leurs droits et leurs responsabilités à la défendre. Nous demandons aux peuples libres du monde et aux alliés du peuple palestinien de pratiquer une vraie solidarité avec la lutte anticoloniale du peuple palestinien en ne prenant pas position sur la déclaration de l’État, mais plutôt à continuer à mettre à mal l’impunité d’Israël par les moyens du Boycott sous toutes ses formes économiques, académiques et culturelles, du Désinvestissement et des Sanctions. Jusqu’au Retour et la Libération »
C’est cela qui reste important, déterminant et déjà, à sa façon, vraiment historique. Ce qui est certain c’est que la lutte pour les droits palestiniens doit s’intensifier. Là-bas, en Palestine et dans le monde arabe, comme ici au sein des puissances occidentales mal en point....
Jean-Paul NUÑEZ CCIPPP34
18/09/2011
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