dimanche 6 novembre 2011

Islam et héritage: La prétendue inégalité de la femme par rapport à l'homme




Article de Laura Asma

C'est encore un des grands griefs que l'on entend faire à l'islam à propos de la prétendue inégalité de la femme par rapport à l'homme en matière d'héritage.
Ceci est le fait d'une totale ignorance de la loi islamique sur ce sujet.

La polémique
Cette polémique traditionnelle qui dure depuis bien longtemps au sujet de l'héritage de la femme est suscitée par le décret suivant : « au mâle revient une part équivalente à celle de deux femelles » .
Cette règle est en fait un fragment du verset coranique suivant :
« Voici ce que Dieu vous enjoint au sujet de vos enfants : au mâle revient une part équivalente à celle de deux femelles. » 
Sourate 4 intitulée les Femmes, An-Nisâ', verset 11
Le verset se poursuit par toute une série de situations qu'il serait ici fastidieux et inutile de détailler.

Exclusivement pour l'héritage des enfants
 Ce  verset établit une loi concernant exclusivement l'héritage des enfants.
Les autres héritiers, hommes et femmes, ont leurs lois spécifiques.
En général, la part de ces héritiers ne dépend pas du sexe. Il peut même arriver que la part de la femme devienne supérieure à celle de l'homme.
Voici quelques situations où la part de la femme est égale voire supérieure à celle de l'homme.
  1. 1. Premièrement, si le défunt laisse des enfants, un père et une mère, alors le père comme la mère prennent chacun le sixième de l'héritage, sans différence de sexe entre les deux et sans prendre en considération la règle « au mâle revient une part équivalente à celle de deux femelles » . Ces deux parts sont explicitement mentionnées dans le Coran : « Quant aux père et mère du défunt, à chacun d'eux revient le sixième de ce qu'il laisse » .
  2. 2. Deuxièmement, si le défunt laisse un frère et une sœur utérins et qu'ils ne sont exclus par aucun héritier de prime ordre (2) ,  alors le frère comme la sœur prennent le sixième de l'héritage, sans différence de sexe entre les deux et sans prendre en considération la règle « au mâle revient une part équivalente à celle de deux femelles » [. Ces deux parts sont explicitement mentionnées dans le Coran : « cependant qu'il laisse un frère ou une soeur, à chacun de ceux-ci revient alors un sixième » (3).
  3. 3. Troisièmement, si le défunt laisse un nombre de frères utérins supérieur à deux et un nombre de sœurs supérieur à deux, alors les frères se partagent le tiers de l'héritage et les sœurs se partagent le tiers de l'héritage également, sans différence de sexe entre les deux groupes, et sans prendre en considération la règle « au mâle revient une part équivalente à celle de deux femelles » .
  4. 4.Quatrièmement, si la défunte laisse un époux et une fille, alors la fille prend la moitié de l'héritage et l'époux ne prend que le quart. C'est-à-dire que la femme, dans ce cas, hérite du double de l'homme.
  5. 5. Cinquièmement, si le défunt laisse une épouse, deux filles et un frère, alors l'épouse prend le huitième de l'héritage, les deux filles se partagent les deux tiers et le reste revient à leur oncle qui est le frère du défunt. Ainsi chacune des deux filles hérite plus que son oncle.En effet, la part de chacune d'elles équivaut aux huit vingt-quatrièmes de l'héritage alors que leur oncle ne prend que cinq vingt-quatrièmes.
Je vous rappelle que c'est au 7ème siècle que ces lois ont été disposés aux musulmans .
Comparaison
En France jusqu'au début du XX ème siècle, Une veuve n'héritait pas de son mari
Nous pouvons lire dans « l'ami de la maison » sorte de mini code civil datant de 1855 :
" Le cas est très rare où la femme peut hériter de son mari car d'après l'article 767 du code civil, il faut pour qu'elle profite de cet avantage à l'exclusion de l'état, que l'époux défunt ne laisse ni parents au degrés successible, ni enfants, naturels. Or il est extrêmement rare qu'une personne en mourant ne laisse quelques parents en deçà du douzième degrés (755)"


Ce n'est pas une règle permanente
Ainsi, il devient manifeste que la règle « au mâle revient une part équivalente à celle de deux femelles »  n'est pas une règle permanente qui s'applique à chaque fois qu'un homme et une femme se réunissent autour d'un héritage comme le prétendent beaucoup de gens.
Cette règle concerne uniquement la situation mentionnée par Dieu, à savoir celle où un frère et sa sœur (frère et sœur germains du défunt) se réunissent autour d'un héritage sans qu'aucun d'eux ne détienne une part explicitement déterminée par le Coran (4).Dans ce cas, le frère prend le double de sa sœur, et ce, qu'ils soient tous deux les enfants du défunt ou bien ses frères. Cette particularité comporte une sagesse infinie pour réaliser la justice entre le frère et la sœur dont les parts n'ont pas été explicitement fixées par le Coran.                                           Nous verrons de quoi il s'agit plus bas...

Dans la période pré-islamique
Dans la période prés islamique, les héritages étaient répartis uniquement entre les mâles ; les femmes ne recevaient rien. Pire, elles étaient elles-même des objets dont on héritait.
Mais l'Islam a interdit cette pratique :
" O vous qui avez cru ! Il ne vous est plus permis d'hériter des femmes contre leur gré (...) "
coran 4/19

Contexte de la révélation du verset

« Voici ce que Dieu vous enjoint au sujet de vos enfants : au mâle revient une part équivalente à celle de deux femelles. » .
Coran 4/11
Le verset relatif à l'héritage a été révélé à propos de certains Ansars (Nom donné aux croyants de Médine qui recueillirent et protégèrent le prophète  Mohamed lors de sa fuite de La Mecque) notamment suite au fait qu'une  femme nommée Um Kabha,  s'adressa au prophète :
-         "  Mon mari vient de mourir et m'a laissé deux filles . Or nous n'avons rien reçu en héritage "
L'oncle des enfants rétorqua :
- "O Envoyé de Dieu ! Elles ne montent pas à cheval, ne portent pas le sabre, et ne frappent pas l'ennemi, et on devrait encore les pourvoir en héritage alors qu'elles n'acquièrent rien par elle même ... ! " (rapporté par Tirmidhi / chaîne de transmission fiable)
L'on voit, comment à  l'époque, les dispositions étaient vraiment défavorables à la femme. Le Coran est venu cassé cette mentalité ,et rectifié l'injustice faite à la femme en matière  d'héritage.
En plus de lui donner son droit légitime à l'héritage , l'islam a ajouté des obligations faites aux hommes à l'égard des femme en matière d'entretien (nous le verrons plus bas)

Pourquoi la sœur n'est pas égale à son frère en matière d'héritage ?
Si un musulmans meurt, en laissant pour seul héritier un frère et une soeur : le fils recevra deux tiers de l'héritage et la fille un tiers. Pourquoi ?
Voyons,  en quoi dans le cas de fratrie, c'est la sœur que le coran a favorisé (malgré les apparences).


Le 1 tiers de la sœur lui appartient en totalité

Le tiers que recevra la sœur entre directement dans son patrimoine personnel (au même titre que sa dot, et ses revenue divers, salaires rentes, affaires, commerces...)
Tout comme l'homme, la femme en Islam jouit du droit de faire des transactions, du droit de vendre, d'acheter, d'être propriétaire, etc
Elle n'a pas lieu d'utiliser se dont elle a hérité pour subvenir à ses propres besoins. Elle en dispose comme elle l'entend, sans que quiconque puisse se mêler de sa gestion, ni son mari ni son frère, .
Ainsi La femme, dans l'Islam, a le droit d'utiliser son argent comme elle l'entend.

Comparaison
La femme en France n'a  obtenu la liberté de ses rentes et biens que 13 siècles après, précisément en 1938.
Jusqu'à cette date,  une femme mariée en France, ne pouvait signer valablement aucun engagement ni se présenter devant le juge pour faire condamner un débiteur par exemple. Elle ne pouvait faire aucun acte sans le concours de son mari ou sans son consentement par écrit ou suppléé par le juge. En effet le mariage restreignait considérablement les droits civils de la femme. En vertu de ce contrat elle perdait son nom, pour prendre celui de l'époux, elle lui abandonnait son indépendance, abdiquait en quelques sorte en sa faveur, le soin de défendre ses intérêts pour s'identifier à lui et confondre son existence avec la sienne.

Les deux tiers du frère ne sont pas en sa total propriété.

Le frère qui a reçu les deux tiers de l'héritage a l'obligation impérative de subvenir à tous les besoins matériels de sa sœur (logée, nourrie  vêtue, soignée si elle est malade, nantie d'un trousseau pour son mariage, le cas échéant, la charge d'études assumées etc...) et cette situation peut parfois durer des années . Cette obligation résulte en particulier d'un verset du coran :
«  Les hommes ont la charges de s'occuper des femmes ... »
Coran 4/34
Mais aussi dans de nombreux hadiths : " Il suffit pour l'homme comme péché de refuser leur subsistance à ceux qui dépendent de lui ... "
Et l'islam contraint les musulmans à être juste et équitables à tel point qu'il exige du musulman d'intervenir dans tous les cas où il constate une injustice.
En outre, par exemple, il n'est pas permis pour favoriser l'un des enfants par rapport à un autre de lui faire un cadeau de son vivant, sans faire de même à l'égard des autres enfants.
Sachant qu' en plus de son devoir de frère envers sa sœur (si parents décédés). Le frère peut aussi avoir à sa charge son épouse et ses enfants.
Or en Islam, Un homme doit être juste et équitable envers sa femme. En islam, il incombe en effet au mari de pourvoir aux besoins de sa femme et de son foyer. Et rappelons que L'épouse n'est pas obligée d'avoir recours à son argent pour les dépenses du foyer.
  • La femme mariée est prise en charge au niveau de l'alimentation, de l'habillement, du logement, de la santé et de toute chose traditionnellement requise pour une femme et conforme à la loi islamique.
  • Son mari doit lui accorder la préférence sur toute autre personne. Par exemple, la prise en charge financière de l'épouse passe avant celle des parents, lorsque le mari n'a pas les moyens de s'occuper des deux.
Comparaison
Or en France et jusque dans les premières décennies du XXe siècle, bien que chaque époux conservaient la propriété de ses biens personnels mobiliers, immobiliers, d'avant  et pendant le mariage, le mari avait tout de même le droit exclusif d'administrer les biens de sa femmes et d'en percevoir les fruits de ses revenus pour soutenir les charges du mariage .
La femme et ses héritiers étaient privés de toute part dans les acquisitions, gains, économies que faisait le mari pendant le mariage et le produit et gain provenant de la collaboration commune appartenaient au mari (ceci dans le régime de la communauté) La femme devait contribuer aux charges du mariage jusqu'à concurrence des tiers de son revenu.
Sous le régime dotal, la femme avait plus de droits, car comme son nom le stipule, La dot y avait un caractère particulier qui la distinguait des autres biens de la femmes. L'on souligne sous ce régime,
-         les bien dotaux , ce que la femme apportait au mari pour soutenir les charges du mariage
-          et  les biens paraphernaux. (tous les biens de la femme, dont elle peut jouir, mais dont elle ne pouvait tout de même pas ni les aliéner ni les paraître en jugement sans l'autorisation de son mari, ou celui d'un juge. Ce qui reste une grande injustice à l'égard  de la citoyenne française il y a encore quelques décennies.

Pour revenir à l'héritage dans la fratrie, en islam, nous avons donc compris que la part que le frère touche ne lui appartient pas en totalité, elle est supérieure à celle de sa sœur, en vue de tous les obligations et des dépenses qui a devoir de faire. Or sa sœur, aura toujours le droit de garder pour elle ou de dépenser son argent d'héritage comme bon lui semble. En islam, l'argent de la femme lui appartient, elle n'a jamais la responsabilité de ses moyens de subsistance, soit entant que fille, sœur, épouse (sauf certains cas, ex : famille mono-parental) . C'est donc la femme qui est en Islam privilégié.

Conclusion  récapitulative
L'islam pense  dans un souci d'équité, dans la mesure où, c'est à l'homme que reviennent toutes les charges matérielles du foyer. C'est à lui et à lui seul de subvenir financièrement aux besoins de son épouse, de ses enfants, de sa sœur (si parents décédés) ou même de ses parents si ces derniers sont dans le besoin.
La femme musulmane, elle, est dispensée de ces charges. Elle est libre de faire de son argent tout ce qu'elle désire, le dépenser ou l'épargner. Il est donc logique que deux sœurs, par exemple, héritent chacune de la moitié de la somme revenant à leur frère, vu qu'elles seront entièrement prises en charge par leurs frère (si parents décédés) et époux.
L'islam dés le 7ème siècle avait respecté à sa juste valeur la femme, lui donnant tous ses droits légitimes, et rectifiant les injustices dont elle était victime . Elle travaillait, témoignait, vendait, achetait, et héritait, cela en totale indépendance .
..
Ce n'est que 13 siècle plus tard que l'occident  rattrapera son retard et rectifiera le statut de la femme et ses droits dans la société.
(Ce que l'on pouvait lire sur les droits restreints de la femme dans le mariage, l'ami de la maison, manuel encyclopédique 1855)
 « (...)Ce n'est point un abus de force qui a donné à l'homme  la prééminence dans la société conjugale .Cete loi est une conséquence toute naturelle de la faiblesse de la femme et un homme rendu à son sexe par cette sage prévoyance. Faible et timide, elle trouve dans l'homme un protecteur et un appui, elle est déchargée du soin pénible des affaires et par une conséquence qui dérive de cette mesure, la société conjugale, la famille a un défenseur viril et un chef  pour la gouverner  et y maintenir l'ordre (...) .

Réflexion finale
Ainsi, ceux qui présument le caractère archaïque de l'islam , feraient mieux de se replonger dans leur histoire, et d' essayer de réfléchir sur l'évolution qu'ils ont donné à la liberté et à l'émancipation de la femme.
Entre une femme soumise à son mari, et à la loi, dont on privilégiait la place à la maison,
et une femme soumise aux diktats de la mode, croyant se libérer en montrant d'elles ce que ces hommes ont plaisir à voir et n'espérant avoir  un salaire supérieur au leur,  qu'en posant dans des couvertures de magazine . .... Il n'y a aucun progrès, aucune liberté et surtout aucun respect !
Cet article avait donc pour but   
-         de faire taire l'équivoque sur la présumée inégalité de l'héritage en Islam,
-         et de montrer comme L'Islam et sa jurisprudence , étaient en  progrès et restent  de nos jours progressifs , évolutifs et dynamiques.

Et Dieu est le plus Savant.

Laura Asma

Source
Les ouvrages qui m'ont aidé pour l'écriture de cet article :
-         Les écrits du professeur, Dr Muhammad Sa'îd Ramadân Al-Bûtî
-         « Etre musulmane aujourd'hui » par Malika Dif,  édition Tawhid
-         L'ami de la Maison (Manuel encyclopédie) par M D'Authelande, treizième édition, 1855
-         Banque de fatwa disponible sur Islamophile Ressousce islamique en langue française
Remerciements à :
  • Notre chroniqueuse Plume-Blanche ( conseils,idées)
  • Mr Sourd (pour l'emprunt de ses archives)
  • Bibliothèque de la mosquée de Nevers 

Notes
[1] Sourate 4 intitulée les Femmes, An-Nisâ', verset 11.
[2] Dans le code successoral, les héritiers sont classés selon leur ordre de proximité avec le défunt. L'existence d'un héritier de premier ordre exclut les héritiers des ordres suivants de la répartition de la succession. En arabe, ce mécanisme s'appelle al-hajbi.e. l'exclusion ou le masquage.
[3] Sourate 4 intitulée les Femmes, An-Nisâ', verset 12.
[4] Dans le code successoral islamique, certains héritiers héritent qu'une part déterminée (le quart, le sixième etc. ; on parle defarîdah dans la terminologie arabe) tandis que les autres héritiers se partagent le reste.
 
http://ouktiasma.over-blog.com/article-34292153.html

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