On bombarde, occupe, tue dans des pays entiers. L’Irak, la Libye, la Côte d’Ivoire, la Syrie, peut-être demain l’Iran. Dans une sorte d’indifférence générale qui fait de notre monde un univers froid. C’est ainsi qu’on enchaîne les Grecs, les Espagnols, les Portugais, les Italiens, les Chypriotes et les… Français. De prétendues dettes, de réels plans d’austérité, des drames et des tragédies.
Tout a été fait pour détourner les Français de la politique.Pour la plupart des gens, la politique, ça se résume à un combat des chefs que l’on tranche, de temps à autre, d’un négligent bulletin de vote. Et après, on s’étonne que le petit peuple se désintéresse de la chose publique ! Pour le moment cet attentisme et ce fameux individualisme tant mis en avant maintiennent le statu quo du système en place.
La société est en totale mutation. On est passé d’une société largement ouvrière à une société marquée et traumatisée par le chômage avec, et c’est loin d’être négligeable, un espace rural déserté, soumis à la concurrence des agricultures étrangères. Le tissu social a subi des modifications en profondeur. La mise en place des technologies informatisées et automatisées a transformé les lieux de travail, lesquels se sont dépeuplés. Les salariés, quel que soit leur activité, ont davantage de rapport avec un écran qu’avec des collègues.
La rue est toujours plus l’affaire de véhicules en nombre croissant, de pollution, de stationnement et de bouchons. La rue est de moins en moins un espace convivial, elle est un lieu pour passants pressés.
A un niveau supérieur, le célibat et le recul du mariage ou de la vie à deux fabriquent une solitude massivement partagée et la pratique collective du divorce plonge les familles dans l’homoparentalité. Les personnes âgées vivent plus longtemps, mais seules et fragilisées. Le seul lieu de rendez-vous, c’est la télé…
La télé a subi une orientation recherchée et obtenue : l’émission triviale, facile, bêtement ludique, qui incline à la passivité, à la perméabilité. Télé réalité, variétés, séries, essentiellement US, infos tronquées et manipulées. Le soir, après une journée de travail souvent abêtissant, l’aire de repos est cette émission de télé lourde et glauque dans laquelle se vautrent des millions de téléspectateurs.
Il y avait des partis politique, qui cultiventait la solidarité et la pratiquait. C’était les réunions, le porte à porte, les tracts à la porte des usines, des bureaux, des lieux de travail, la vente de la presse, sinon quotidienne, du moins hebdomadaire. Les gens rencontraient les gens, discutaient, échangeaient. Il y avait des actions communes : manifestations, meetings, débats, fêtes, permanences pour parler des difficultés et les surmonter. Tout un peuple militant tissait un maillage humain vivant, chaleureux et solidaire.
Désormais, c’est l’inquiétude, voire l’angoisse, du crédit, du chômage, des impayés, d’être jeté à la rue. Pour des millions de personnes se sont toujours les fins de mois angoissants, les difficultés à vivre, à s’en sortir, à exister. Leurs seul horizon est la réalité des villes surpeuplées, des campagnes désertées, la solitude, le rêve et la fuite par M6, TF1, la médiocrité, l’imbécillité. Le sport tient lieu de diversion. Tout y passe : les blessures, les transferts, la vie intime des joueurs. On fait dans le people et l’événement : chanteurs, acteurs, personnalités. Est-elle enceinte? C’est dans la presse. Est-il trompé ? Aussi. On a fabriqué des « fans », des millions de gens seuls qui croient vibrer par procuration.
Et c’est l’air malin qu’on proclame : « Tous pourris! » ou « Je ne fais pas de politique, tous les mêmes! », ce qui est, pour une bonne part, la stricte réalité.
Et c’est ainsi qu’on bombarde, occupe, tue dans des pays entiers. L’Irak, la Libye, la Côte d’Ivoire, la Syrie, peut-être demain l’Iran. Dans une sorte d’indifférence générale qui fait de notre monde un univers froid. C’est ainsi qu’on enchaîne les Grecs, les Espagnols, les Portugais, les Italiens, les Chypriotes et les… Français. De prétendues dettes, de réels plans d’austérité, des drames et des tragédies.
Mais l’attentisme, c’est une façon d’absorber, d’intérioriser, d’assimiler et de comprendre. Dessous, s’opère le mécanisme intellectuel, la prise de conscience. La colère sourde, la colère gronde. Et gare à la revanche quand tous les peuples s’y mettront…
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