En réponse aux bombardements qui ont lieu au Pakistan, une coalition d'artistes a lancé un nouveau projet: placer au sol des images géantes visibles du ciel représentant le visage d'enfants victimes d'attaques de drones.
«Les humains ressemblent à des insectes sans importance lorsqu'ils sont vus du haut des airs, au moyen de la caméra d'un drone, écrivent les auteurs de Inside Out Project, un collectif d'artistes locaux et internationaux, dont fait partie l'artiste français JR. Nous voulons changer cela. Désormais, l'opérateur du drone verra le visage d'un enfant, créant un dialogue et, peut-être, de l'empathie.»
En entrevue, Zeke Johnson, directeur du programme Sécurité et droits de l'homme d'Amnistie internationale, à New York, note que l'attitude de l'administration Obama au sujet des assassinats perpétrés avec des drones se résume ainsi: «Ne vous inquiétez pas, faites-nous confiance, nous suivons la loi.»
«Le gouvernement américain n'a pas instauré de balises claires pour encadrer les assassinats extrajudiciaires. Le programme des drones se déroule dans un secret quasi complet.»
Le premier portrait visible des airs représente une enfant pakistanaise dont la famille a été tuée par une attaque de drones, selon les responsables du projet. L'oeuvre, intitulée Not A Bug Splat (Pas un insecte écrasé), a été installée dans un champ de la province du Khyber Pakhtunkhwa, près de la frontière avec l'Afghanistan, une région où des milliers de personnes ont été tuées par des drones depuis 10 ans.
Les auteurs du projet disent aussi souhaiter que les images soient photographiées par les satellites, «histoire de les rendre permanentes sur les sites de cartographie en ligne».
Depuis 2004, le Bureau of Investigative Journalism a enregistré 383 frappes de drones de la CIA au Pakistan, dont 332 sont survenues alors que Barack Obama était au pouvoir. Ces frappes ont fait entre 2296 et 3718 morts - dont entre 168 et 202 enfants - et plus de 1000 blessés.
Le Bureau a noté qu'aucune frappe de drone n'avait été enregistrée jusqu'ici en 2014, une trêve sans précédent depuis les 10 dernières années dans la région. La trêve dans les attaques coïncide avec le début des négociations de paix entre le gouvernement du Pakistan et les talibans qui se trouvent sur le territoire.
Pour Zeke Johnson, le gouvernement américain doit faire preuve d'une plus grande transparence sur le fonctionnement du programme et la détermination des personnes ciblées. «Nous voulons que le gouvernement suive les lois internationales, et nous voulons qu'il prenne ses responsabilités, dédommage les victimes d'erreurs et qu'il poursuive les auteurs d'assassinats qui contreviendraient à la loi.»
Il cite l'assassinat de Mamana Bibi, une grand-mère de 68 ans, tuée par un drone au Pakistan en octobre 2012 alors qu'elle récoltait des légumes dans le champ familial pour préparer le souper. Plusieurs de ses petits-enfants l'ont vue être atteinte par un missile Hellfire. Le gouvernement américain n'a jusqu'ici pas voulu discuter de sa mort ni admettre quelque responsabilité.
«Ce cas et plusieurs autres soulèvent des doutes sur la légalité des assassinats perpétrés par les États-Unis. Et si le gouvernement mène des enquêtes - ce qui n'est pas certain -, alors leurs résultats devraient être rendus publics, une fois pour toutes.»
Source:
The Bureau of Investigative Journalism
http://www.lapresse.ca/international/asie-oceanie/201404/10/01-4756233-pakistan-le-visage-des-victimes-des-drones.php
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