samedi 28 mai 2011

Espagne: une révolte citoyenne pour sanctionner la politique d'austérité



Dimanche, les socialistes au pouvoir en Espagne ont essuyé une défaite lors des élections municipales. La révolte citoyenne en marche depuis plusieurs jours a porté ses fruits, sanctionnant la politique d'austérité socialiste. Laurent Pinsolle explique cette fronde populaire par la régression sociale qui sévit en Europe, en Espagne et en Grèce tout particulièrement.



La crise des dettes souveraines en Europe a entrainé des plans d’austérité violents pour la Grèce, l’Irlande et le Portugal, poussant une partie de la population à manifester dans la rue. Bien que n’ayant pas encore à subir la tutelle du FMI, de la BCE et de la Commission, l’Espagne se révolte également.

Au centre, la croissance introuvable

L’Europe et la zone euro se retrouve face à une double impasse. La première concerne les pays occidentaux. L’ouverture commerciale anarchique a provoqué une désindustrialisation et une délocalisation massives, vers l’Asie comme vers les pays d’Europe orientale. Ce mouvement explique le maintien d’un chômage de masse dans l’ensemble de la zone euro et une stagnation de 90% des salaires, mis en concurrence avec des pays où le SMIC est 10 à 30 fois plus bas.

Bref, la partie occidentale de l’Europe avait déjà un gros problème de modèle de développement économique avant 2008, qui y a ajouté une crise majeure des finances publiques. En outre, le « succès » des deux pays cités en exemple pendant les années 2000, Grande-Bretagne et Espagne, a été largement relativisé. Ces deux pays ont très largement vécu à crédit et ont profité de bulles financières et immobilières et ont aujourd’hui la gueule de bois.

A la périphérie, une grande régression sociale

Mais la situation est encore pire pour les pays de la périphérie de la zone euro. Si la baisse des taux a temporairement baissé le coût de la dette publique, elle a aussi provoqué une croissance à crédit et inflationniste qui a détérioré la compétitivité de ces pays. Ils sont aujourd’hui coincés dans une situation intenable, entre une dette devenue trop lourde avec la hausse des taux et des balances commerciales déficitaires, sans possibilité de dévaluer pour la rééquilibrer.

Face à cette situation, l’Europe propose un cocktail amer de financement de la dette à la place des marchés et de plans d’austérité pour redresser les finances publiques. A défaut de pouvoir relancer la croissance en dévaluant, les plans d’austérité sont extrêmement sévères, ce qui approfondit la récession et rend plus difficile l’assainissement budgétaire : le déficit 2010 de la Grèce a atteint 10.5% contre une prévision initiale de 8.1%, qui sera dure à atteindre… en 2011.

Vers une révolte populaire

Bref, la situation semble intenable puisque les solutions aux problèmes financiers des pays aggravent ces mêmes problèmes au lieu de les régler. En outre, les peuples se voient imposer une régression sociale violente, une envolée du chômage, une baisse du pouvoir d’achat et une diminution des aides sociales. L’Espagne, qui était pourtant le bon élève de l’Europe dans les années 2000, s’impose le même régime pour éviter de demander l’aide du FMI et de l’Europe.

Mais les peuples en ont logiquement assez de payer aussi durement une crise alors que les institutions financières, largement aidées par l’argent public, sont revenues à leur indécente normalité. Le sentiment d’injustice pousse à la révolte, d’où les manifestations en Grèce et en Espagne. Et après la rue, cette révolte pourrait se retrouver dans les urnes, comme on l’a vu en Islande ou en Irlande. Ce n’est plus qu’une question de temps dans cette Europe.

Bien sûr, la comparaison avec les pays arabes peut paraître osée, néanmoins, une colère populaire se fait jour pour se révolter contre ce système économique ubuesque, inefficace, instable et injuste. Cette Union Européenne antisociale approche de sa fin.

Retrouvez d'autres articles de Laurent Pinsolle sur son blog.

Lundi 23 Mai 2011
Laurent Pinsolle - Blogueur associé

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