dimanche 4 décembre 2011

L’ASSASSINAT DE FARHAT HACHAD, OU : DE L’IMPUNITÉ DU CRIME DE GUERRE COLONIAL



Par : Houcine BARDI
Houcine BARDINous nous proposons dans cet article de rechercher la qualification juridique la plus pertinente qui permettrait de saisir utilement les juridictions françaises d’une plainte concernant l’assassinat, le 5 décembre 1952, de Farhat HACHAD.
C’est un fait historique « avéré » que le leader syndicaliste et national tunisien F. HACHAD a été assassiné par l’organisation terroriste « LA MAIN ROUGE ».
Cette vérité n’était, jusqu’à présent, étayée par aucune preuve matérielle. L’absence de plainte, qui aurait pu permettre l’ouverture d’une enquête et des investigations judiciaires à propos de cet assassinat politique, se trouve, sans doute, à l’origine de l’opacité qui a constamment entouré ce «secret de polichinelle ».
De rares recherches historiques ont révélé l’implication plus ou moins directe du gouvernement français de l’époque (IVème République) dans cet assassinat. L’organisation terroriste « LA MAIN ROUGE » n’aurait été qu’un exécutant des décisions politiques prises par l’exécutif français d’alors[1].
Un revirement spectaculaire aura, cependant, lieu le 18 décembre 2009 à l’occasion de la transmission par la chaîne satellitaire AL JAZIRA, d’un documentaire historique consacré à Farhat HACHAD.
Dans ce documentaire télévisuel, un dénommé Antoine MÉLÉRO (auteur d’un livre publié en 1997 aux éditions du Rocher : « La main rouge, armée secrète de la République », passé quasiment inaperçu lors de sa sortie), se présentant comme membre de l’organisation terroriste LA MAIN ROUGE, a explicitement revendiqué l’assassinat de F. HACHAD, en disant, notamment, que « si c’était à refaire je le referai ». Et le même de décrire avec force détails l’implication directe des plus hautes sphères de l’État français, en la personne du Président du Conseil PINAY, dans la mise en place de ladite organisation terroriste, de la présence en son sein d’officiers français en service (tel que le capitaine FILLETTE), et de l’existence d’instructions explicites visant l’assassinat d’un certain nombre de tunisiens opposants au régime colonial, dont F. HACHAD.
Il s’agit là d’un aveu qui intervient plus de 50 ans après la commission du dit assassinat.
Ces révélations nous interpellent à plus d’un titre. Elles soulèvent également un certain nombre de problèmes juridiques se rapportant d’une part au droit d’accès aux archives, toujours couvertes par le secret[2], et d’autre part la prescription (de droit commun) des faits incriminés.
I. SUR LA PRESCRIPTION
La prescription (de l’action publique ou/et de la peine) pourrait être sommairement définie comme étant l’impossibilité actuelle d’engager des poursuites pénales à l’encontre des auteurs de faits délictueux commis (ou « jugés ») depuis un certain temps. L’action publique, qu’elle soit engagée par le parquet, ou mise en mouvement par la partie civile, devient impossible au-delà d’un certain délai. L’inaction de la justice se justifie alors par la nécessité d’oublier. Le fait de raviver les souvenirs liés à l’infraction non sanctionnée serait susceptible de menacer « la paix sociale » et « l’ordre public ». On invoque également à l’appui de la justification de la prescription, la « sanction » que s’inflige le coupable en se dissimulant durant le délai pendant lequel il risque d’être poursuivi.
Cet état de fait résulte le plus souvent de la négligence et de la carence des organes de poursuite (le ministère public).
Dans le cas d’espèce ce délai est prévu par l’article 7 du Code de procédure pénale aux termes duquel « En matière de crime, et sous réserve des dispositions de l’article 213 – 5 du Code pénal, l’action publique se prescrit par 10 années révolues à compter du jour où le crime a été commis si, dans cet intervalle, il n’a été fait aucun acte d’instruction ou de poursuite… » (L’article 213 – 5 concerne l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité, eux-mêmes définis à l’article 212 – 1 du Code pénal qui s’inspire largement de l’article 6 (c) du Statut du Tribunal militaire international de Nuremberg annexé à l’accord de Londres du 8 août 1945)
L’assassinat de Farhat HACHAD a eu lieu le 5 décembre 1952. Vu l’absence du moindre acte d’instruction ou de poursuite dans cette affaire, les faits incriminés se trouveraient, a priori, prescrits le 6 décembre 1962.
Il convient dès à présent d’opérer une distinction entre l’acte d’assassinat de HACHAD et les déclarations récentes de M. MÉLÉRO.
Comment, en effet, qualifier juridiquement ces deux actes ?
II. L’ASSASSINAT DE HACHAD EST-IL UN CRIME DE GUERRE ?
Le crime de guerre tel qu’il a été défini par le Statut du Tribunal militaire international de Nuremberg, annexé à l’Accord de Londres du 8 août 1945, concerne : « les violations des lois et coutumes de la guerre. Ces violations comprennent, sans y être limitées, l’assassinat, les mauvais traitements et la déportation pour des travaux forcés ou pour tout autre but, des populations civiles dans les territoires occupés, l’assassinat ou les mauvais traitements des prisonniers de guerre ou des personnes en mer, l’exécution des otages, le pillage des biens publics ou privés, la destruction sans motif des villes et des villages ou la dévastation que ne justifient pas les exigences militaires ; »
Le crime de guerre est, donc, celui commis à l’encontre de personnes protégées par le droit international humanitaire (définition retenue par le projet de loi « Badinter » de 2003)
En 1952, date à laquelle HACHAD a été assassiné, la Tunisie était encore sous « protectorat » français (instauré notamment par les Conventions du 12 mai 1881, du 8 juin 1882 et du 30 octobre 1882). Ce régime colonial a été imposé par les armes[3]. Il s’agit d’une occupation au sens de l’article 42 du Règlement de La Haye du 18 octobre 1907, aux termes duquel « un territoire est considéré comme occupé lorsqu’il se trouve placé de fait sous l’autorité de l’armée ennemie… ».
Les accords passés entre la puissance occupante (la France) et les autorités du pays soumis à occupation (le Royaume Beylical tunisien) ne privent en aucun cas la population du pays concerné (la Tunisie) de la protection garantie par le droit international humanitaire (article 47 de la quatrième Convention de Genève)[4]. Les bénéficiaires de cette protection ne peuvent eux-mêmes renoncer à cette protection (article 8 de la même Convention)[5].
Il importe peu, au regard du droit international humanitaire, que l’occupation soit dite « protectorat », «administration », « libération »… seule, en effet, la réalité sur le terrain (c’est-à-dire les faits) détermine l’applicabilité des règles protectrices des populations soumises à occupation.
L’article 2, commun aux quatre conventions de Genève de 1949, ainsi que leurs deux protocoles additionnels de 1977, vont dans le même sens.
La France a ratifié ces instruments internationaux et s’est engagée à les respecter. Elle était notamment tenue par les dispositions de l’article 46 du Règlement de la Haye de 1907 qui stipule «L’honneur et les droits de la famille, la vie des individus et la propriété privée, ainsi que les convictions religieuses et l’exercice des cultes, doivent être respectés. La propriété privée ne peut pas être confisquée »
Farhat HACHAD avait été enlevé, séquestré[6] et assassiné[7] en date du 5 décembre 1952. Il s’agit d’un assassinat politique. Les révélations récentes faites par Antoine MÉLÉRO prouvent que l’organisation terroriste « LA MAIN ROUGE » avait agi sur instruction directe du Président du Conseil, PINAY.
L’implication du gouvernement français de l’époque (commanditaire du crime dont il s’agit) engage donc de manière incontestable la responsabilité de l’Etat français (sur la base du principe de la continuité).
En tout état de cause, les autorités coloniales, prolongement direct et « naturel » du gouvernement de la République française, endosse entièrement la responsabilité de l’assassinat du leader syndicaliste et national tunisien.
Il s’agit donc d’un crime de guerre, dans la mesure où il a été commis à l’encontre d’une personne bénéficiant de la protection du droit international humanitaire.
III. LE CRIME DE GUERRE EST-IL IMPRESCRIPTIBLE ?
La réponse à cette question varie selon que l’on se place sur le terrain du droit humanitaire coutumier, ou sur le terrain du droit interne français.
A. EN DROIT INTERNATIONAL COUTUMIER.
C’est la convention de l’ONU du 26 novembre 1968 relative à l’imprescriptibilité des crimes de guerre et crimes contre l’humanité, qui a introduit pour la première fois, en droit international, la notion d’imprescriptibilité concernant les crimes de guerre.
Il est dit dans l’article premier de cette Convention que «Les crimes suivants sont imprescriptibles, quelle que soit la date à laquelle ils ont été commis:
a) Les crimes de guerre, tels qu’ils sont définis dans le Statut du Tribunal militaire international de Nuremberg du 8 août 1945 et confirmés par les résolutions 3 (I) et 95 (I) de l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies, en date des 13 février 1946 et 11 décembre 1946, notamment les « infractions graves » énumérées dans les Conventions de Genève du 12 août 1949 pour la protection des victimes de guerre… »
Les infractions graves auxquelles renvois l’article précédent sont visées, entre autres, par l’article 147 de la IVème Convention de Genève, aux termes duquel :
« Les infractions graves visées à l’article précédent sont celles qui comportent l’un ou l’autre des actes suivants, s’ils sont commis contre des personnes ou des biens protégés par la Convention : l’homicide intentionnel, la torture ou les traitements inhumains, y compris les expériences biologiques, le fait de causer intentionnellement de grandes souffrances ou de porter des atteintes graves à l’intégrité physique ou à la santé, la déportation ou le transfert illégaux, la détention illégale, le fait de contraindre une personne protégée à servir dans les forces armées de la Puissance ennemie, ou celui de la priver de son droit d’être jugée régulièrement et impartialement selon les prescriptions de la présente Convention, la prise d’otages, la destruction et l’appropriation de biens non justifiées par des nécessités militaires et exécutées sur une grande échelle de façon illicite et arbitraire. »
Cette Convention signée seulement par 43 Etats membres des Nations Unies (les pays de l’ex bloc de l’Est, les pays arabes et africains ; ratifiée par la Tunisie le 15 juin 1972), entrée en vigueur le 11 novembre 1970, n’a quasiment aucune valeur effective à l’échelle internationale. Ni la France, ni les autres grands acteurs du droit international ne l’ont ratifiée.
La France adoptera la même attitude (« protectionniste » vis-à-vis des criminels de guerre) à l’égard de la Convention européenne sur l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre, signée à Strasbourg le 25 janvier 1974[8].
B. EN DROIT INTERNE (FRANÇAIS)
Le droit français, sans ignorer totalement cette catégorie, il ne lui consacre, cependant, aucune définition ni aucun article dans le Code pénal. Il s’agit là d’un choix constant adopté indistinctement par les gouvernements successifs de la Ve République, et qui doit être qualifié comme tel, c’est-à-dire une organisation légale de l’impunité au profit des présumés criminels de guerre.
La seule référence explicite aux crimes de guerre est contenue dans une Ordonnance prise par le Gouvernement Provisoire, en date du 28 août 1944 (consolidée le 16 septembre 1948), qui confie au Tribunal Militaire (dont la compétence est actuellement en cours d’être confiée à une chambre spécifique du TGI de Paris ; projet de loi…) la compétence d’en connaître « conformément aux lois françaises en vigueur »[9]. Lesquelles lois soumettent les crimes de guerre à la prescription de droit commun.
Déjà au lendemain de la guerre d’Algérie une série de lois d’amnistie a consacré cette impunité : loi du 23 décembre 1964[10], loi du 17 juin 1966, loi du 31 juillet 1968.
Cette méconnaissance « de principe » a été réitérée, une fois de plus, via une position quasiment isolée de la France (imitée, fort heureusement, seulement par la Colombie, et pour cause !) lors de l’adoption du Statut de la Cour Pénale Internationale, dit Statut de Rome (1998), en formulant —en vertu de l’article 124 dudit Statut— la déclaration suivante : « Un État qui devient partie au présent Statut peut déclarer que, pour une période de sept ans à partir de l’entrée en vigueur du Statut à son égard, il n’accepte pas la compétence de la Cour en ce qui concerne la catégorie de crimes visée à l’article 8 lorsqu’il est allégué qu’un crime a été commis sur son territoire ou par ses ressortissants » (vu la longueur de l’article 8, on a préféré l’annexer intégralement à la présente étude ; il contient des définitions plus larges et plus pertinentes que celles adoptées par le droit français, concernant les crimes contre l’humanité, les crimes de génocide et les crimes de guerre…)
La France a ratifié le Statut de Rome le 9 juin 2000. En 2008 le député François Lamy a adressé une question écrite à Mme le ministre de la justice garde des sceaux (JO: 22/04/2008 page : 3393) dans laquelle il lui demandait si « elle entend déposer au plus vite un projet de loi conforme aux principes généraux du droit pénal international afin que la France ne devienne pas un îlot d’impunité pour les plus grands criminels ». La réponse, intervenue plus de huit mois après (JO : 02/12/2008 page : 10498), disait ceci « S’agissant de la prescription des crimes établis par le traité de Rome, la garde des sceaux, ministre de la justice, rappelle qu’en droit français la prescription des infractions répond à une exigence constitutionnelle et que, partant, seuls les crimes contre l’humanité sont imprescriptibles. En outre, en opportunité, l’imprescriptibilité des crimes de guerre aurait pour effet de banaliser la catégorie des crimes contre l’humanité en les faisant relever du même régime juridique que ces derniers. »
Un avis émis, le 23 novembre 2001, par la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme (CNCDH) avait interpellé les autorités françaises dans le même sens, afin que le droit interne puisse être adapté au Statut de la CPI, et notamment son article 8 (annexé au présent document).
Dans le même contexte une proposition de loi déposée par le sénateur Robert Badinter (au nom du groupe socialiste, apparenté et rattachée (80 sénateurs)), lors de la séance du 26 juin 2003, portait sur la création d’une incrimination imprescriptible relative aux crimes de guerre.
Toutes ces interpellations n’ont malheureusement pas abouti. Le législateur français persiste dans sa frilosité et n’admet toujours pas l’imprescriptibilité des crimes de guerre.
La jurisprudence, quant à elle, a particulièrement manqué « d’inventivité » en la matière puisqu’elle est aussi anonyme que constante à appliquer la prescription de droit commun (10 ans) aux crimes de guerre.
Tel est notamment le cas de l’arrêt de principe rendu par la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans l’affaire Klaus BARBIE (20 décembre 1985, pourvoi N°: 85-95166) :
« Attendu qu’on ne saurait soutenir, comme le fait l’association demanderesse, que les crimes de guerre, dans la mesure où ils sont également définis par l’article 6 du statut du tribunal militaire international de Nuremberg annexe a l’accord de Londres du 8 aout 1945, seraient assimilables, au regard du principe d’imprescriptibilité, aux crimes contre l’humanité ;
Qu’en effet, contrairement a ces derniers, les crimes de guerre sont directement rattachés a l’existence d’une situation d’hostilités déclarées entre les Etats dont relèvent respectivement les auteurs et les victimes des faits ;
Qu’après la cessation de ces hostilités, il est nécessaire que le temps estompe les éventuelles exactions commises pendant la durée du conflit armé, même si elles l’ont été en violation des lois et coutumes de la guerre ou sans avoir été justifiées par les exigences militaires, dès lors qu’elles ne sont pas de nature à revêtir la qualification de crimes contre l’humanité ;
Qu’aucun principe de droit ayant une autorité supérieure a celle de la loi française ne permet de déclarer imprescriptibles les crimes de guerre, ni au sens de l’accord de Londres du 8 août 1945 ni à celui de l’ordonnance du 28 aout 1944 qui lui est antérieure ;
Que l’article 2-4 du code de procédure pénale, dans sa rédaction résultant de la loi du 10 juin 1983, est à cet égard sans portée, ses dispositions étant applicables aux seules procédures concernant des crimes de guerre dans lesquelles la prescription n’est pas acquise ;
Qu’ainsi le moyen proposé ne peut être retenu ; »
Les crimes de guerre commis au nom et pour le compte de la République (française) ont, dans un premier temps (l’immédiat après décolonisation), été amnistiés (le cas de l’Algérie), et dans un second temps prescrits. Il y a eu, pour ainsi dire, un verrouillage législatif visant à empêcher (ou plus exactement, à rendre impossible !) toute tentative de poursuite à l’encontre des criminels de guerre.
Le seul moyen légal dont disposent les familles des victimes et les associations de défense de la mémoire des « résistants à l’occupation », assassinés froidement par les autorités coloniales ou commandités par l’Etat et exécutés par ses « mains secrètes », est l’apologie de crimes de guerre, lorsque les criminels (bénéficiant de l’impunité) osent faire publiquement l’éloge de leurs crimes impardonnables (amnistiés ou prescrits).
IV. LE DÉLIT D’APOLOGIE DE CRIMES ET DE CRIMES DE GUERRE
A. LES FAITS ET LE DROIT
Ce délit est prévu par l’article 24 alinéa 3 de la loi du 29 juillet 1881, aux termes duquel : « Seront punis de cinq ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ceux qui, par l’un des moyens énoncés à l’article précédent, auront directement provoqué, dans le cas où cette provocation n’aurait pas été suivie d’effet, à commettre l’une des infractions suivantes (…) :
Seront punis de la même peine ceux qui, par l’un des moyens énoncés en l’article 23, auront fait l’apologie des crimes visés au premier alinéa, des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou des crimes et délits de collaboration avec l’ennemi. »
L’article 23 auquel il est fait référence, vise les moyens utilisés dans la provocation aux crimes et délits, dont « tout moyen de communication audiovisuelle » (AL JAZIRA).
L’infraction serait constituée à partir du moment où les propos inciteraient le lecteur, l’auditeur, le téléspectateur (ou l’internaute) à porter un jugement de valeur morale favorable sur l’acte incriminé ou ses auteurs.
L’enregistrement de l’émission diffusée par la chaîne satellitaire AL JAZIRA, le 18 décembre 2009, fait apparaître le dénommé Antoine MÉLÉRO, relater les circonstances précises ayant entouré l’assassinat de F. HACHAD, auquel il a pris part. Il décrit tout d’abord l’interception du véhicule que conduisait la victime, lequel a été précipité au bord de la route suite à un mitraillage provenant d’un autre véhicule occupé par les assassins (les membres de l’organisation terroriste LA MAIN ROUGE). Il évoque ensuite, comment la victime, contre l’attente de ses agresseurs, était sortie miraculeusement vivante, ensanglantée et trébuchante. Un camion s’était arrêté pour lui porter secours, mais un autre véhicule occupé par une seconde équipe de LA MAIN ROUGE, chargée «d’achever le travail des premiers », l’a « recueillie » en lui faisant croire qu’il allait être transporté à l’hôpital.
La victime a donc été amenée dans ce deuxième véhicule, toujours selon les révélations de M. MÉLÉRO, pour y être ensuite abattu froidement par une balle dans la tête et « jetée » au bord de la route, non loin du village de « Nâssane ».
M. MÉLÉRO affirme clairement avoir pris part à cet assassinat odieux, qu’il justifie de la manière suivante : HACHAD représentait un danger pour les intérêts de la France engagée dans des négociations avec le Néo-Destour. Contrairement à BOURGUIBA qui avait les faveurs du gouvernement de la République, il constituait une menace à ces mêmes intérêts. Il devait mourir.
Il dit, d’autre part, que l’organisation terroriste à laquelle il appartenait avait reçu des instructions directes du président du Conseil (PINAY) pour « liquider » HACHAD.
Des membres de la police nationale (en service), tel que le capitaine FILLETTE, ont collaboré directement et étroitement avec l’organisation terroriste LA MAIN ROUGE ; « deux membres sur quatre » des assassins de HACHAD « étaient des policiers » !
M. MÉLÉRO, dira également que c’est le Ministre de l’intérieur de l’époque (François Mitterrand) qui rapatriera, en urgence, les assassins en métropole…
Une reconstitution numérique du guet-apens et de « l’opération » dans son ensemble, approuvée par M. MÉLÉRO, est contenue dans le même documentaire (d’AL JAZIRA).
Monsieur MÉLÉRO achèvera son « témoignage » en disant que cet assassinat était « légitime » et que « si c’était à refaire je le referai »
De ce qui précède, il ressort que les propos tenus par le dénommé MÉLÉRO constituent une apologie de crime de guerre, ou pour le moins une apologie de crime tout court (au cas où le Tribunal ne retiendrait pas la première qualification), sanctionnée par les dispositions de l’article 24 – 3 de la loi du 29 juillet 1881 (5 ans d’emprisonnement et 45 0000 € d’amende).
En effet, la jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de Cassation est unanime et constante[11] à considérer que :
« … pour reconnaître à certains des propos incriminés un caractère apologétique, l’arrêt énonce que l’apologie au sens de l’article 24, alinéa 3, de la loi sur la presse n’est pas synonyme d’éloge ni de provocation directe ; que les juges relèvent que, dans plusieurs passages de son livre, Paul X… assortit son récit de commentaires sur l’emploi de la torture ou la pratique des exécutions sommaires qui, au nom de l’efficacité, tendent à les légitimer et incitent à porter sur elles un jugement favorable ; qu’ils retiennent encore que l’éditeur ne prend aucune distance vis-à-vis du texte et glorifie même son auteur en le présentant comme une “légende vivante” ;Attendu qu’en l’état de ces énonciations, la Cour de cassation, à qui il appartient d’exercer son contrôle sur le point de savoir si l’écrit poursuivi en vertu de l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881 présente le caractère d’une apologie des crimes ou délits qui y sont visés, est en mesure de s’assurer, par l’examen de l’ouvrage incriminé, que les passages retenus par la cour d’appel entrent dans les prévisions du texte précité ;
Qu’en présentant comme susceptibles d’être justifiés des actes constitutifs de crimes de guerre, l’écrit doit être considéré comme en ayant fait l’apologie ;
Que l’intention coupable se déduit du caractère volontaire des agissements incriminés ». Arrêt rendu dans l’affaire AUSSARESSES (C. cass. Ch. Crim., 7 décembre 2004, pourvoi N°: 03-82832)[12]
En se fondant sur la qualification de crime de guerre de l’acte d’assassinat de HACHAD (eu égard, notamment, au fait que la victime est une personne protégée par le droit international humanitaire ; la Tunisie étant alors sous occupation française…), M. MÉLÉRO encourt des poursuites pénales pour apologie de crimes de guerre (art. 24-3, L. 29/07/1881)
B. SUR LA RECEVABILITÉ DE LA PLAINTE AVEC CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE DE L’ASSOCIATION « VÉRITÉ ET JUSTICE POUR FARHAT HACHAD »
Il convient tout d’abord de rappeler que l’action, aussi bien pénale que civile, relative aux crimes, délits et contraventions prévus par la loi du 29 juillet 1881 se prescrivent, indistinctement, par trois mois.
En droit commun, le délai de prescription des délits est quinquennal. Les délits commis par voie de presse sont d’une nature particulière, eu égard au fait qu’ils concernent une liberté démocratique fondamentale protégée, entre autres, par les dispositions de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme. Le court délai de prescription retenu par le législateur, vise à protéger et à renforcer cette liberté fondamentale dans une société démocratique.
Aux termes de l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881 : « L’action publique et l’action civile résultant des crimes, délits et contraventions prévus par la présente loi se prescriront après trois mois révolus, à compter du jour où ils auront été commis ou du jour du dernier acte d’instruction ou de poursuite s’il en a été fait.
Toutefois, avant l’engagement des poursuites, seules les réquisitions aux fins d’enquête seront interruptives de prescription. Ces réquisitions devront, à peine de nullité, articuler et qualifier les provocations, outrages, diffamations et injures à raison desquels l’enquête est ordonnée.
Les prescriptions commencées à l’époque de la publication de la présente loi, et pour lesquelles il faudrait encore, suivant les lois existantes, plus de trois mois à compter de la même époque, seront, par ce laps de trois mois, définitivement accomplies. »
Les propos tenus par le dénommé Antoine MÉLÉRO datent du 18 décembre 2009 (date de la première diffusion du documentaire d’AL JAZIRA). Le décompte du délai de prescription a pour point de départ le jour suivant, c’est-à-dire le 19 décembre. Les faits dont il s’agit seront donc prescrits le 20 mars 2010.
Il importe, d’autre part, de rappeler les dispositions légales régissant l’action en justice des associations :
· Pour qu’une association puisse ester en justice elle doit satisfaire à la condition contenue dans l’article 5 de la loi du 1er juillet 1901. C’est-à-dire que sa création doit faire l’objet d’une publication au Journal Officiel (alinéa 5)
L’association « VÉRITÉ ET JUSTICE POUR FARHAT HACHAD » a fait l’objet d’une publication au JORF du 16 janvier 2010 (142e année. – N° 3, p. 243). Elle jouit donc de la personnalité morale et de la capacité juridique, et peut, par conséquent, conformément aux lois en vigueur, ester en justice. Le fait que l’association (VJFH) ait été créée officiellement postérieurement aux faits qu’on se propose de poursuivre (les déclarations de M. MÉLÉRO, constitutives d’apologie de crimes de guerre…), ne devrait pas, en principe, nous empêcher de nous constituer (Cass. civ. 1, 27 mai 1975[13])
· Le problème qui se pose —s’agissant d’une action tendant à poursuivre du chef « d’apologie de crimes de guerre »— a trait aux conditions d’antériorité (5 ans) émises par les articles 2-4[14] et 2-5[15] du titre préliminaire du Code de procédure pénale. Ces articles s’appliquent, cependant, aux associations défendant des intérêts généraux. Ce qui n’est pas le cas de l’AVJFH qui défend la mémoire d’un seul individu. Elle a été, pour ainsi dire, créée pour les besoins de la cause. Or, il est un principe général que veut que les associations ne peuvent exercer l’action civile devant les juridictions répressives pour demander réparation du préjudice qui leur est causé par l’infraction alléguée. Seules les associations « habilitées par le législateur » et remplissant la triple condition de la spécificité de l’objet, de l’agrément requis et de l’antériorité, sont admises, à titre exceptionnel, à le faire.
· Un autre problème risque de surgir au cas où le procureur de la République ou le juge d’instruction considèreraient que le but poursuivi par l’association VJFH représente un « intérêt général». Dans ce cas notre action (plainte avec constitution de partie civile) serait purement et simplement irrecevable, puisque on ne remplit pas la condition d’antériorité de l’article 2-1 (et suivants) du Code de procédure pénale.
· Nous pourrions également nous trouver confrontés à une troisième difficulté : notre plainte risquerait d’être déclarée irrecevable pour défaut ou insuffisance d’intérêt à agir[16]. N’étant pas parmi les associations bénéficiant d’une habilitation législative, nous devons, par conséquent, prouver l’existence d’un préjudice[17] (matériel ou moral) collectif (ayant lésé l’ensemble des adhérents) résultant directement de l’infraction, d’« apologie de crimes de guerre », commise par Antoine MÉLÉRO.
· Il convient en outre de rappeler l’existence d’une jurisprudence (contestable[18]) de la chambre criminelle de la Cour de cassation qui veut « qu’en vertu des dispositions combinées des articles 48, 2[19], de la loi du 29 juillet 1881 et 2-5 du Code de procédure pénale, seule une association se proposant, par ses statuts, de défendre les intérêts moraux et l’honneur de la Résistance et des déportés peut intenter une telle action » (Crim., 1er septembre 2005). L’objet de notre association[20] (qui est de création toute récente) est spécifique et non général. En tout état de cause, notre association ne remplit pas la condition d’antériorité (au moins 5 ans d’existence déclarée à la daté des faits !).
De ce qui précède il résulte que la plainte avec constitution de partie civile qui serait engagée exclusivement par l’Association VJFH risque fort d’être déclarée irrecevable !
La solution la plus pertinente, pour accroitre les chances d’aboutissement d’une plainte avec constitution de partie civile, serait donc d’associer d’autres associations amies (LDH, FIDH, par exemple) à notre initiative judiciaire.
Dans cette même perspective, il est également opportun d’inviter l’UGTT à y prendre part.
Il est désormais possible à une association de droit étranger (UGTT en l’occurrence, voire même la LTDH) d’ester en justice en France, sans qu’elle ait besoin de procéder à la déclaration préalable auprès de « la Préfecture du lieu de son établissement principal » (exigence de l’article 5 de la L. 28/07/1881).
Par arrêt rendu en date du 15 janvier 2009, la Cour européenne des droits de l’homme (5ème Section) a condamné (une fois de plus !) la France pour manquement aux dispositions de l’article 6-1 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en ce que deux associations étrangères (« LIGUE DU MONDE ISLAMIQUE » ET « ORGANISATION ISLAMIQUE MONDIALE DU SECOURS ISLAMIQUE ») avaient été déclarées irrecevables en leur plainte avec constitution de partie civile devant les juridictions françaises, au motif qu’elles ne satisfaisaient pas aux conditions de l’article 5 de la loi du 28 juillet 1881 (déclaration préalable auprès de la Préfecture).
La Cour a tout d’abord relevé (en réponse aux arguments avancés par la représentante de l’Etat français) que « la présente affaire ne concerne pas la reconnaissance en France de la personnalité juridique d’une association étrangère, mais plutôt l’accès à un tribunal des deux associations cherchant à obtenir réparation du préjudice qu’elles prétendaient avoir subi du fait de la publication d’un article qu’elles estimaient diffamatoire. Si la Convention ne garantit pas un droit à une telle reconnaissance, elle garantit le droit d’accès à un tribunal afin qu’il connaisse d’une contestation relative à des droits et obligations de caractère civil. »
La Cour a, ensuite, rappelé que « les restrictions à la capacité d’ester en justice doivent être strictement limitées. Ainsi dans l’arrêt Eglise catholique de la Canée c. Grèce (16 décembre 1997, §§ 40-42, Recueil 1997- VIII), elle a considéré qu’en jugeant que la requérante se trouvait dans l’incapacité d’ester en justice, faute de disposer de la personnalité juridique, les juridictions civiles n’avaient pas seulement sanctionné l’inobservation d’une simple formalité nécessaire à l’ordre public, mais lui avaient imposé une véritable restriction l’empêchant de faire trancher par les tribunaux tout litige relatif à ses droits de propriété (voir aussi Les Saints Monastères c. Grèce, 9 décembre 1994, § 83, série A no 301-A). »
Enfin, elle a estimé : « qu’en exigeant la déclaration prévue à l’article 5 de la loi de 1901 pour une association étrangère n’ayant pas de  » principal établissement  » en France et souhaitant introduire une action en diffamation afin de lui permettre d’ester en justice, les autorités françaises n’ont pas seulement sanctionné l’inobservation d’une simple formalité nécessaire à la protection de l’ordre public et des tiers, comme le soutient le gouvernement. Elles ont aussi imposé aux requérantes une véritable restriction, au demeurant non suffisamment prévisible, qui porte atteinte à la substance même de leur droit d’accès à un tribunal, de sorte qu’il y a eu violation de l’article 6 de la Convention. »
Il s’agit-là d’un arrêt de principe qui s’impose tant au législateur qu’à la jurisprudence, qui a jusqu’ici (à deux exceptions près : Cass. Civ., 7 février 1912 : DP 1912. I. 433 ; TGI Paris 12 juin 1991) refusé de reconnaître aux associations étrangères, non déclarées préalablement aux préfectures, le droit d’ester en justice. C’est un désaveu cinglant au système législatif français (régissant les associations) excessivement restrictif et discriminatoire… Désormais, les associations étrangères, régulièrement constituées selon leurs droits nationaux, ont la possibilité d’ester devant la justice française pour porter plainte et demander réparation de leurs préjudices[21].
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[1] Antoine MÉLÉRO, La main rouge : Armée secrète de la République, Paris, Le Rocher, 1997. «Antoine MÉLÉRO est né en 1929 à Mogador (Maroc). Ancien sportif, il officie comme policier au Maroc puis en France jusqu’en 1965, et se reconvertit en tant que conseiller juridique puis détective privé. Il assure la sécurité de certains hommes politiques, et participe aux campagnes présidentielles de François Mitterrand, seul favorable à l’amnistie des soldats perdus. » Jean-Emile NEAUME.
[2] Le secret relatif aux archives HACHAD, devrait, en principe, expirer en 2012, conformément aux dispositions de l’article L. 213-2 (I) 3° du Code du patrimoine, tel qu’issu de la loi du 15 juillet 2008 : « Par dérogation aux dispositions de l’article L. 213-1 :
I.-Les archives publiques sont communicables de plein droit à l’expiration d’un délai de :
3°) Cinquante ans à compter de la date du document ou du document le plus récent inclus dans le dossier, pour les documents dont la communication porte atteinte au secret de la défense nationale, aux intérêts fondamentaux de l’Etat dans la conduite de la politique extérieure, à la sûreté de l’Etat, à la sécurité publique, à la sécurité des personnes ou à la protection de la vie privée, à l’exception des documents mentionnés aux 4° et 5°. Le même délai s’applique aux documents qui portent une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable, ou qui font apparaître le comportement d’une personne dans des conditions susceptibles de lui porter préjudice.
Le même délai s’applique aux documents relatifs à la construction, à l’équipement et au fonctionnement des ouvrages, bâtiments ou parties de bâtiment utilisés pour la détention des personnes ou recevant habituellement des personnes détenues. Ce délai est décompté depuis la fin de l’affectation à ces usages des ouvrages, bâtiments ou parties de bâtiment en cause ; »
[3] Ali MAHJOUBI, L’instauration du protectorat français en Tunisie, Tunis, Cérès Editions, 1986 (en arabe)
[4] « Les personnes protégées qui se trouvent dans un territoire occupé ne seront privées, en aucun cas ni d’aucune manière, du bénéfice de la présente Convention, soit en vertu d’un changement quelconque intervenu du fait de l’occupation dans les institutions ou le gouvernement du territoire en question, soit par un accord passé entre les autorités du territoire occupé et la Puissance occupante, soit encore en raison de l’annexion par cette dernière de tout ou partie du territoire occupé. »
[5] « Les personnes protégées ne pourront en aucun cas renoncer partiellement ou totalement aux droits que leur assure la présente Convention et, le cas échéant, les accords spéciaux visés à l’article précédent »
[6] Article 224-1 C. Pénal : « Le fait, sans ordre des autorités constituées et hors les cas prévus par la loi, d’arrêter, d’enlever, de détenir ou de séquestrer une personne, est puni de vingt ans de réclusion criminelle. »
[7] Article 224-2 C. Pénal : « L’infraction prévue à l’article 224-1 est punie de trente ans de réclusion criminelle lorsque la victime a subi une mutilation ou une infirmité permanente provoquée volontairement ou résultant soit des conditions de détention, soit d’une privation d’aliments ou de soins.
Elle est punie de la réclusion criminelle à perpétuité lorsqu’elle est précédée ou accompagnée de tortures ou d’actes de barbarie ou lorsqu’elle est suivie de la mort de la victime. »
[8] Article 1er : « Tout Etat contractant s’engage à prendre les mesures nécessaires afin que la prescription soit inapplicable à la poursuite des infractions suivantes et à l’exécution des peines prononcées pour de telles infractions, pour autant qu’elles sont punissables dans sa législation nationale:
1. les crimes contre l’humanité prévus par la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, adoptée le 9 décembre 1948 par l’Assemblée générale des Nations Unies;
2. a / les infractions prévues aux articles 50 de la Convention de Genève de 1949 pour l’amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces armées en campagne, 51 de la Convention de Genève de 1949 pour l’amélioration du sort des blessés, des malades et des naufragés des forces armées sur mer, 130 de la Convention de Genève de 1949 relative au traitement des prisonniers de guerre et 147 de la Convention de Genève de 1949 relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre,
b / toutes violations analogues des lois de la guerre en vigueur lors de l’entrée en application de la présente Convention et des coutumes de la guerre existant à ce moment, qui ne sont pas déjà prévues par les dispositions susvisées des Conventions de Genève, lorsque l’infraction considérée en l’espèce revêt une particulière gravité, soit en raison de ses éléments matériels et intentionnels, soit en raison de l’étendue de ses conséquences prévisibles
3. toutes autres infractions aux lois et coutumes du droit international tel qu’il sera établi à l’avenir, considérées par l’Etat contractant intéressé, aux termes d’une déclaration faite conformément à l’article 6, comme étant de nature analogue à celles prévues aux paragraphes 1 ou 2 du présent article»
[9] Article 1er : « Sont poursuivis devant les tribunaux militaires français et jugés conformément aux lois françaises en vigueur et aux dispositions de la présente ordonnance, les nationaux ennemis ou agents non français au service de l’administration ou des intérêts ennemis, coupables de crimes ou de délits commis depuis l’ouverture des hostilités soit en France ou dans un territoire relevant de l’autorité de la France, soit à l’encontre d’un national ou d’un protégé français, d’un militaire servant ou ayant servi sous le drapeau français, d’un apatride résidant sur le territoire français avant le 17 juin 1940 ou d’un réfugié sur un territoire français, soit au préjudice des biens de toutes les personnes physiques visées ci-dessus et de toutes les personnes morales françaises, lorsque ces infractions, même accomplies à l’occasion ou sous le prétexte de l’état de guerre, ne sont pas justifiées par les lois et coutumes de la guerre »
[10] Article 1er « Sont amnistiées de plein droit toutes les infractions commises en Algérie avant le 20 mars 1962, en réplique aux excès de l’insurrection algérienne, à la condition qu’elles soient sans rapport avec une entreprise tendant à empêcher l’exercice de l’autorité de l’État ou à substituer à cette autorité une l’autorité illégale »
[11] Cour de Cassation, Chambre criminelle : 28 novembre 2006, 06-80.340, Publié au bulletin ; 1 septembre 2005, 04-86.756, Inédit ; 1 septembre 2005, 04-86.757, Inédit ; 12 avril 2005, 04-84.288, Publié au bulletin ; 7 décembre 2004, 03-82.832, Publié au bulletin 16 novembre 1993, 90-83.128, Publié au bulletin ; 23 février 1993, 92-83.478, Publié au bulletin ; 21 octobre 1992, 92-80.684, Inédit ; 20 décembre 1988, 87-91.778, Publié au bulletin ; 8 novembre 1988, 87-91.445, Inédit ; 19 juillet 1988, 85-90.767, Inédit ; 14 janvier 1971, 70-90.558, Publié au bulletin ; 14 janvier 1971, 70-90.558, Publié au bulletin.
[13] « Mais attendu qu’une association régulièrement déclarée peut réclamer la réparation des atteintes portées aux intérêts collectifs de ses membres et que son action est recevable dans les limites de son objet social, même si le préjudice invoque est antérieur a la date de sa constitution ; » A noter que cet arrêt à été rendu en matière civile et non pénale !
[14] Article 2-4 « Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans qui se propose, par ses statuts, de combattre les crimes contre l’humanité ou les crimes de guerre ou de défendre les intérêts moraux et l’honneur de la Résistance ou des déportés peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité. »
[15] Article 2-5 « Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits qui se propose, par ses statuts, de défendre les intérêts moraux et l’honneur de la Résistance ou des déportés peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne soit l’apologie des crimes de guerre ou des crimes ou délits de collaboration avec l’ennemi, soit les destructions ou dégradations de monuments ou les violations de sépultures, soit les délits de diffamation ou injures, qui ont causé un préjudice direct ou indirect à la mission qu’elle remplit. »
[16] « Mais attendu qu’il résulte des articles 31 du nouveau Code de procédure civile et 1er de la loi du 1er juillet 1901 que, hors habilitation législative, une association ne peut agir en justice au nom d’intérêts collectifs qu’autant que ceux-ci entrent dans son objet social ;
Et attendu qu’après avoir précisé l’objet de l’association et constaté que la maison dont la démolition était demandée, était éloignée du site à protéger et n’était visible ni du château ni de l’église, la cour d’appel a apprécié souverainement le défaut d’intérêt à agir de l’association ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ; » (Cass. Civ ., 27 mai 2004 N° de pourvoi: 02-15700 publié au Bulletin)
[17] « Attendu qu’un préjudice direct et personnel et un droit né et actuel peuvent seuls servir de base a une intervention civile devant la juridiction répressive ;
Qu’en conséquence, et sauf dispositions légales contraires l’action civile n’est recevable qu’autant que la partie qui l’intente a été personnellement lésée par le crime ou le délit imputé au prévenu ;
Attendu qu’en statuant au fond et en accordant des dommages-intérêts a l’association “équipes d’action contre la traite des femmes et des enfants” alors qu’en vertu des textes applicables qui étaient en vigueur elle aurait du déclarer son action irrecevable, la cour d’appel a méconnu les principes ci-dessus rappelés ; Qu’ainsi l’arrêt encourt la cassation ; » (Crim., 27 mai 1975)
[18] Contestable, parce qu’il s’agit d’une restriction et une discrimination à l’égard des autres associations, ne pouvant se justifier au regard des dispositions de l’article 6-1 de Convention européenne des droits de l’homme (droit à un procès équitable ; droit d’accès à un tribunal…).
[19] « Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, qui se propose, par ses statuts, de défendre les intérêts moraux et l’honneur de la Résistance ou des déportés peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne l’apologie des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou des crimes ou délits de collaboration avec l’ennemi et en ce qui concerne l’infraction prévue par l’article 24 bis »
[20] Art. 2 But : « Cette association a pour but de rechercher et faire connaître, par tous les moyens légaux, la vérité sur l’assassinat du leader syndicaliste tunisien Farhat HACHAD, et de poursuivre, le cas échéant, tout éventuel responsable de sa mort, à quelque titre que ce soit, devant les juridictions françaises ou/et internationales. »
[21] La chambre criminelle (de la Cour de cassation) a, depuis, adapté sa jurisprudence pour se conformer à celle de la Cour européenne des droits de l’homme : Crim. 8 décembre 2009 N° de pourvoi: 09-81607 « Mais attendu qu’en l’état de ces motifs, et alors que toute personne morale étrangère, qui se prétend victime d’une infraction, est habilitée à se constituer partie civile, devant une juridiction française, dans les conditions prévues par l’article 2 du code de procédure pénale, même si elle n’a pas d’établissement en France, et n’a pas fait de déclaration préalable à la préfecture, la cour d’appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus énoncé ; Que la cassation est, dès lors, encourue de ce chef ; »

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