dimanche 11 mars 2012

ACTUALITÉ Monde RSS Afghanistan : un soldat américain massacre 16 civils


La province de Kandahar est l'un des bastions les plus importants des talibans en Afghanistan.
Seize civils afghans, dont des enfants et des personnes âgées, ont été massacrés par un soldat américain sorti de sa base très tôt dimanche matin dans la province de Kandahar, bastion taliban du sud de l'Afghanistan. "Je suis entré dans trois maisons et j'ai compté 16 morts, qui incluaient ceux d'enfants, de femmes et d'hommes âgés", a déclaré un journaliste de l'Agence France-Presse qui a pu visiter les lieux de cette tragédie qui risque d'aggraver la tension chronique entre la population et les troupes étrangères. 
"Dans une maison, il y avait dix personnes, dont des femmes et des enfants, qui avaient été tuées et brûlées dans une pièce. Une autre femme gisait, morte, dans l'entrée de la maison", a-t-il dit. "Ils ont été tués et brûlés. J'ai vu au moins deux enfants, âgés de 2 ou 3 ans, qui l'étaient", a noté le correspondant. "Dans une autre maison", située dans un second village, "quatre personnes étaient mortes. J'ai vu leurs corps étendus dans une pièce. Il y avait deux hommes âgés, un mineur et une femme", a poursuivi le journaliste, qui a également vu une autre dépouille dans une troisième maison.

"Fusillade tragique" (Washington)

L'Isaf, la force armée de l'Otan, a reconnu pour la première fois dans un communiqué envoyé vers 16 heures locale, soit 13 heures après les faits, l'existence de "morts" civils afghans. "Je ne peux pas expliquer les motivations derrière ces actions insensées, mais ce n'était en aucun cas autorisé par l'Isaf", a observé le général Adrian Bradshaw, commandant adjoint de l'Isaf, qui a exprimé, au nom de l'Isaf, ses "regrets sincères" et sa "peine" pour "cet incident épouvantable". Dimanche, vers 3 heures du matin (samedi à 23h30, heure de Paris), "un soldat est sorti de sa base et il s'est mis à tirer. (Puis) il est rentré dans son bureau et a été placé en détention", a indiqué un responsable occidental. 
Les États-Unis, via leur ambassade à Kaboul, ont envoyé "leurs condoléances les plus sincères aux familles des victimes de la fusillade tragique". "Nous sommes attristés par cet acte violent contre nos amis afghans. Les forces américaines procurent le plus haut niveau de soin aux blessés", a fait savoir l'ambassade américaine, qui "déplore" et "dénonce" "toute attaque d'un membre" de ses forces armées "contre des civils innocents". "Nous assurons le peuple afghan que le ou les individus responsables de cet acte seront identifiés et jugés", a-t-elle poursuivi, ajoutant que les États-Unis "essayaient encore de vérifier les faits".

Risque de représailles

La fusillade de dimanche, qui plus est dirigée contre des civils afghans, une première en Afghanistan, est une catastrophe pour l'Otan et ses troupes, déjà visées de plus en plus régulièrement par des "tirs amis" de soldats afghans qu'elles forment, ce qui a plombé la confiance entre les deux camps. La situation, déjà extrêmement tendue, risque encore de s'aggraver, des représailles étant attendues. Six militaires américains ont été abattus par leurs collègues afghans entre le 23 février et le 1er mars, après l'incinération d'exemplaires du Coran dans la base militaire américaine de Bagram et les très violentes manifestations antiaméricaines qui ont suivi - au lourd bilan de 30 morts et 200 blessés. Deux d'entre eux, des conseillers, ont été tués dans leur bureau du ministère de l'Intérieur à Kaboul, l'un des endroits les plus sécurisés du pays. 
Arrivée fin 2001 afin de chasser les talibans du pouvoir et neutraliser Oussama ben Laden, la coalition de l'Otan, dirigée par les États-Unis, s'est progressivement installée sur place sous couvert de maintien de la paix et d'interposition. Malgré des succès d'envergure sur les rebelles et la présence de plus de 130.000 soldats étrangers, l'Isaf n'a jamais pu défaire l'insurrection, étant au contraire victime de pertes importantes dans la guérilla imposée par les insurgés. L'Isaf aide l'Afghanistan à bâtir ses propres forces de sécurité. Face au coût financier énorme de l'opération et à l'enlisement vraisemblable de ses troupes, la coalition internationale a décidé de faire quitter le pays à ses forces combattantes fin 2014. Après l'incinération de Corans en février, une vidéo découverte mi-janvier sur internet montrant des soldats américains en train d'uriner sur des cadavres afghans et le massacre de dimanche, tout ceci en un peu plus de deux mois, les troupes étrangères risquent de connaître une fin de séjour difficile en Afghanistan.
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