Il a inspiré des discours de Chavez et d'Ahmadinejad; il est écouté par Poutine et Assad; il a fait partie du dernier gouvernement de la Jamahariya libyenne. Qui est donc Thierry Meyssan ? Pour les uns, complotistes d'extrême droite, pour les autres intellectuel révolutionnaire, il est à coup sûr l'un des penseurs les plus influents de notre époque et l'un des plus contestés.
« Meyssan est la principale source
de désinformation anti-américaine dans le monde »,
Condoleezza Rice, 27 juillet 2005
« Pour comprendre ce qui se passe,
il faut lire le penseur français Thierry Meyssan »
Hugo Chavez Frias, 3 juin 2007
Thierry Meyssan est né en 1957 dans la région de Bordeaux (France). Issu d’une famille de diplomates et de militaires, il a appris à ce contact l’art de la politique et de la négociation. Son grand-père, le colonel Pierre Gaïsset, fut parmi les premiers officiers supérieurs français à entrer aux Nations Unies. Il prit la relève du colonel André Serot, lorsque celui-ci fut assassiné avec le comte Folke Bernadotte, puis il devint président de la Commission d’armistice Israël-Liban. Peut-être cette histoire familiale explique-t-elle sont attrait spontané pour le Proche-Orient. Thierry Meyssan est le fils de Michel Meyssan, conseiller du Premier ministre Jacques Chaban-Delmas à la Mairie de Bordeaux. De ce fait, il a été éduqué dans l’idéal du gaullisme social.
Thierry Meyssan poursuit toutes ses études chez les pères jésuites, à Saint-Joseph-de-Tivoli (Bordeaux, France) et à l’AloisiusKolleg (Bonn-Badgodersberg, Allemagne). Puis, il suit des études de Sciences politiques à l’Institut d’études politiques de Paris, de théologie à l’Institut supérieur de théologie d’Orléans, enfin de philosophie et de sociologie à l’Université de Reims.
Cependant, il interrompt ses études pour élever son, puis ses, fils, et entrer dans la vie active. Après avoir exercé divers emplois, il se consacre progressivement au journalisme comme pigiste. En 1994, il devient rédacteur en chef du mensuel d’information internationales Maintenant, très marqué à gauche. Il y pratique une forme de journalisme qui essaye de s’abstraire des sujets à la mode et des tendances de l’opinion publique pour se consacrer à l’observation des décisions politiques le plus en amont possible. Cette expérience est aujourd’hui étudiée dans certaines écoles de journalisme (par exemple à l’université de Moscou) parce que les sujets traités dans ce mensuel l’ont souvent été deux ans en avance sur ses confrères. Maintenant se caractérise aussi par une mise en page avant-gardiste à laquelle participent de nombreux artistes réunis par Kiki Picasso. Par tâtonnements, le mensuel tente de trouver une présentation qui soit en adéquation avec le caractère innovant des sujets traités. Certains éléments ont été repris depuis par la presse magazine française.
Simultanément, Thierry Meyssan milite au sein de plusieurs associations de défense des libertés individuelles. Habile débatteur, bien que parfois trop partisan, il s’impose tout au long des années 90 comme un invité incontournable des talks shows télévisés.
En 1993, il rejoint le PRG (plus ancien parti politique français, centre-gauche), dont il devient l’un des secrétaires nationaux. Pendant une décennie, il participe aux équipes de campagne des élections européennes et présidentielles aux côtés de Bernard Tapie, Jean-François Hory et Christiane Taubira. Bonne plume, il rédige des discours des candidats, comme il rédigera des interventions et articles pour de nombreux parlementaires et quelques ministres.
Dans la période 1995-99, à l’initiative du PRG, il participe à la mise en place du Comité national de vigilance contre l’extrême droite, dont il devient le coordinateur national adjoint. Chaque semaine, il réunit les délégués des 40 plus importantes organisations de gauche (partis politiques, syndicats, associations). Le Comité élabore un discours commun face au Front national, mettant fin à une période de surenchère désordonnée qui discréditait la gauche. Le fonctionnement du Comité servira de modèle à la création de la « Gauche plurielle », une coalition qui remportera les élections législatives.
Il créée et préside le Réseau Voltaire. Il s’agit au départ d’une association franco-française, réunissant des délégués de partis politiques et de mouvements de gauche pour la défense de la liberté d’expression et de la laïcité face à une droite revancharde (alors incarnée par le Premier ministre Edouar Balladur et son porte-parole Nicolas Sarközy). Mais, en 1999, l’association se transforme en réaction à la guerre du Kosovo, dans laquelle la France s’est engagée sans débat national. Tout au long du conflit, Thierry Meyssan publie un bulletin électronique quotidien mettant en regard les informations communiquées par l’OTAN —que l’on retrouve dans la presse générale— et les dépêches des agences de presse des Balkans —qui sont ignorées du grand public—. Jour après jour, il décrit ainsi deux versions parallèles et contradictoires des événements : les mensonges des porte-paroles de l’Alliance atlantique qui magnifient une « guerre humanitaire », et les témoignages des journalistes des pays riverains qui attestent des objectifs réels du conflit et de l’ampleur des destructions.
Au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, il publie une série d’articles démontrant l’impossibilité matérielle de la version bushienne des événements, et analysant la transformation du régime politique aux Etats-Unis. En mars 2002, il publie L’Effroyable imposture (préfacé par le général Leonid Ivashov, chef d’état-major des armées russes). Il y démontre que les attentats ont été commandités par une fraction du complexe militaro-industriel pour justifier d’une nouvelle politique impériale. L’ouvrage connaît un succès mondial et est traduit en 28 langues. Une version arabe est éditée à Abu Dhabi par cheik Zayed, président des Emirats arabes unis, et offerte à 5 000 leaders arabes. Le Pentagone y répond en déclarant Thierry Meyssan personna non grata aux Etats-Unis et en menaçant les médias qui le relayent de les priver d’accréditations aux USA, tandis que l’université d’Harvard refuse le sponsoring de cheik Zayed.
Thierry Meyssan consacre les revenus de ses livres à transformer le Réseau Voltaire en une organisation internationale d’échange et de diffusion d’information. Il édite une vingtaine de sites internet pour des journaux et revues progressistes des pays du Sud. Le site commun Voltairenet.org propose des articles en plusieurs langues, principalement en espagnol et en français. Il est fréquenté par 1,2 millions de visiteurs distincts par mois. Le Réseau Voltaire reprend ainsi le combat mené dans les années 70 et 80 par le mouvement des non-alignés contre la dominance des pays du Nord en matière d’information. Il joue un rôle clef dans l’information du public occidental lors de crises orchestrées par les grandes puissances, par exemple lors du coup d’État manqué contre Hugo Chavez au Venezuela, lors de l’enlèvement de Jean-Bertrand Aristide en Haïti, lors de l’agression israélienne de 2006 contre le Liban, ou encore lors de la colonisation de la Libye et de la déstabilisation de la Syrie. Le site internet est d’ailleurs temporairement bloqué par des hackers des Forces de défense israéliennes, puis le centre serveur est physiquement détruit par des inconnus à Paris. Mais ces obstacles n’empêchent pas le Réseau Voltaire de poursuivre son action.
Au travers de ces expériences, Thierry Meyssan élabore progressivement son style journalistique, de plus en plus précis et pédagogique. Il ne cherche plus à polémiquer ou à convaincre, mais à comprendre et à expliquer.
En 2005, Thierry Meyssan organise également une conférence internationale, Axis for Peace, à laquelle participent de hautes personnalités d’une quarantaine de pays pour ajuster leur discours contre les néoconservateurs. La conférence se tient à Bruxelles dans des locaux mis à disposition par le Premier ministre belge Guy Verhofstadt, mais les autorités Schengen refusent d’accorder des visas à de nombreuses délégations (comme la délégation iranienne). L’événement est largement retransmis par satellite par Télésur en Amérique latine et Russia Today en Europe orientale, mais boycotté par les médias des pays de l’Alliance atlantique.
En 2007, il publie L’Effroyable imposture 2 (version arabe sous le titre Détruire le Liban), un ouvrage consacré à la guerre de 2006 et au remodelage du Grand Moyen-Orient. Les deux grands diffuseurs français Hachette-Lagardère et Vivendi-Editis tentent vainement d’empêcher sa mise en librairie, tandis que les régies publicitaires des grands médias font bloc pour interdire toute publicité en sa faveur. Cela n’empêche pas le livre de trouver son public.
Il assure avoir été menacé par l’OTAN juste après l’élection de Nicolas Sarközy à la présidence de la République française et quitte alors précipitamment le pays. De fait, il fait entre autres l’objet d’une tentative d’assassinat au Venezuela, d’une tentative d’enlèvement au Liban, et d'une chasse à l'homme en Libye.
Il entretient des relations personnelles avec de nombreux leaders politiques dans le monde et inspire, par exemple, le discours du président Mahmoud Ahmadinejad à la 65e Assemblée générale des Nations Unies.
Il collabore régulièrement à de grands journaux et revues dans une vingtaine de pays et s’exprime sur les principales chaînes de télévision internationales (Al-Jazeera, Al-Manar, IRIB, Russia Today, Telesur etc.). Bien que très engagé politiquement, il s’efforce toujours de prendre en compte les différents points de vue, de rester lucide et objectif, et de privilégier l’analyse sur le commentaire.
En 2010, il joue son propre rôle dans un docu-fiction de Mohammed Reza Eslamloo, 911 Black Box, et reçoit diverses récompenses, dont le Prix spécial des Droits de l’homme du Farjr Film Festival de Téhéran. Ce film représente officiellement l’Iran au 69e Festival de Cannes.
En 2011, bien que critique de la politique extérieure de Mouammar Kadhafi, il est nommé coordinateur interministériel au sein du Comité technique provisoire de la Jamahiriya arabe libyenne. Il impulse une nouvelle stratégie diplomatique et judiciaire pour faire respecter le Droit international. Cependant cet effort intervient trop tard, l’OTAN s’empare de Tripoli et parvient à imposer à l’ONU un gouvernement fantoche pour représenter la Libye avant que l’Assemblée générale ne puisse condamner les bombardements.
En 2012, il couvre les événements en Syrie et ouvre une nouvelle brèche dans la propagande atlantiste contre ce pays. Dans la contexte de la démocratisation de la Syrie, il forme au Centre d'études stratégiques de Damas les nouveaux cadres politiques de l'Etat.
En définitive, Thierry Meyssan incarne le renouveau du mouvement anti-impérialiste. Il est devenu à la fois l’un des penseurs et acteurs politiques les plus brocardés dans les Etats membres de l’OTAN et l’un des plus influents sur la scène mondiale.
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